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 Pèlerinage

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Aeltharion
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Aeltharion


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MessageSujet: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:05

Introduction:

Bonjour a vous, membre de la communauté!!
Voila, a force de voguer sur la barge de bataille de mon chapitre, chez le Chapelain Thargannis, je suis tombé sur un texte qui a fait l'unanimité chez nous.

Il s'agit d'une histoire écrite par Caius Pertinax sur les Dark Angels. Enfin sur Caius justement, Capitaine de la 3ème Unité d'Assaut Planétaire.

Il s'agit d'une histoire vraiment très bien écrite, que l'on suit d'un bout a l'autre sans s'arrêter, avec un grand suspense, des rebondissements...
bref, c'est un très bon texte!

Avec son accord, je vous le transmet!

N'oubliez pas: l'auteur du texte est Caius Pertinax

Place au Texte!
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Aeltharion
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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:07

Teufelgarten retint son souffle tandis que le gardien parcourait le corridor. La créature ne tarda pas à s'éloigner, les bruits de pas s'amenuisant peu à peu pour se fondre dans le silence humide des couloirs.

D'une pensée, l'Inquisiteur expédia son servo-crâne en reconnaissance. Celui-ci flotta discrètement jusqu'à l'intersection, transmettant servilement une image des lieux jusqu'aux relais visuels de son maître. Rien à gauche, ni à droite. Teufelgartien rappela le servo-crâne et s'avança jusqu'au coin. Une fois son inspection terminée, il devrait poser quelques questions à Azrael : les Dark Angels avaient soigneusement omis de lui parler de ces mystérieuses petites créatures, lesquelles semblaient pourtant grouiller dans les bas-fonds du Roc. S'agissait-il d'une quelconque engeance démoniaque, ou de xenos réduits en esclavage ? Dans un cas comme dans l'autre, l'Ordo Hereticus serait très intéressé par cette découverte.

Teufelgarten s'autorisa un sourire. Ce qu'il s'apprêtait à découvrir aurait bien plus d'importance que ces petits gardiens. Plusieurs décennies de recherches l'avaient empli d'une terrifiante certitude, et il ne lui manquait plus que les preuves nécessaires à la démonstration de ses thèses. Oh, bien sûr, le Chapitre s'était montré particulièrement réticent, mais nul ne peut s'opposer à un mandat de la Très Sainte Inquisition. Les portes de la Tour des Anges s'étaient finalement ouvertes devant Teufelgarten et sa suite, et l'accueil glacial des Astartes n'avait fait qu'attiser le plaisir de l'Inquisiteur. Azrael et ses sbires lui avaient fait visiter de vastes hangars, des arsenaux cyclopéens, des laboratoires et des salles d'entraînement. Toutes choses qui ne l'intéressaient pas le moins du monde, mais qu'il avait tenu à inspecter de fond en comble pour tromper les Marines sur l'objet de sa visite. Pendant trois jours, il avait ainsi joué la comédie, endormant la vigilance de ses guides par des questions naïves et empreintes de banalité. Puis, lorsqu'il avait jugé que la surveillance des Dark Angels se relâchait, il avait mis son plan à exécution. Katarina avait usé de polymorphine pour prendre son apparence et jouer son rôle, cependant qu'il se faufilait en-dehors de ses quartiers et s'enfonçait dans les profondeurs de la forteresse-monastère. La pauvre fille ne survivrait sans doute pas à une telle dose de drogues, mais qu'importe. Il avait deux ou trois remplaçantes toutes désignées, d'autant plus que Katarina satisfaisait de moins en moins ses désirs nocturnes...

L'Inquisiteur poursuivait son exploration dans la pénombre. La pierres grossièrement taillées contrastaient durement avec la magnificence des vastes halls des étages supérieurs. Un froid sourd et angoissant émanait des murs, sans doute dressés des millénaires auparavant. A l'époque, l'édifice se dressait avec superbe au-dessus des forêts de Caliban ; les bâtisseurs pouvaient-ils imaginer que leur oeuvre parcourrait un jour les cieux, juchée sur un fragment disloqué de leur monde anéanti ?

Au détour du couloir, Teufelgarten découvrit ce qu'il cherchait : un nouvel escalier, en colimaçon cette fois, qui s'enfonçait encore plus profondément dans la roche. Peut-être les réponses se trouvaient-elles là. Confiant, l'Inquisiteur poursuivit sa descente vers la Vérité.

Il déboucha dans un souterrain encore plus sombre, encore plus sinistre que le précédent. Ici et là, de lourdes portes de fer et d'airain semblaient encastrées dans la pierre. Il aurait bien voulu les ouvrir toutes, car chacune devait receler un trésor de connaissances ; mais Katarina ne pourrait retenir les Dark Angels indéfiniment. Il devait faire vite.

Teufelgarten accompagna sa progression d'un surcroît de vigilance, faisant grand usage de son servo-crâne pour lui ouvrir la voie et détecter toute menace éventuelle. Finalement, au terme d'un cheminement interminable dans le labyrinthe inextricable des couloirs entremêlés, il parvint à son but. Une large porte d'acier, renforcée de lourdes barres d'adamantium et gravée d'une inscription aussi brève qu'éloquente.


LIBRARIUM

L'Inquisiteur retint un cri de triomphe. Il ne devait pas chanter victoire, pas encore. Il palpa le métal de la porte, cherchant une serrure ou un quelconque mécanisme d'ouverture. Il finit par découvrir deux trous, disposés de façon symétrique de chaque côté de la porte. Ces maudits Astartes devaient avoir bien des secrets, pour recourir à de telles mesures. Mais il en fallait plus pour arrêter l'Inquisiteur Marius Teufelgarten, le Bourreau de Symandre, trois fois loué par ses frères pour avoir démasqué des gouverneurs corrompus et expédié au bûcher la totalité de leurs gouvernements. L'Inquisiteur ouvrit sa sacoche de cuir rehaussée de clous d'or et y saisit les Changeforme. Ces précieux outils avaient été taillés dans de la moelle spectrale, achetée - pour un prix exorbitant - à un Libre Marchand de la bordure orientale. Leur aptitude à changer de structure en réaction à un stumulus mental les rendait irremplaçables pour déverrouiller un mécanisme, aussi complexe soit-il. Bien sûr, l'usage d'un tel objet n'était pas à proprement parler digne d'un serviteur de l'Empereur ; mais Teufelgarten avait depuis bien longtemps compris que la fin justifie toujours les moyens.

L'Inquisiteur prit un Changeforme dans chaque main, les introduisant simultanément dans les deux serrures. Au prix d'une légère concentration, il poussa la moelle spectrale à se fondre dans les interstices. Puis, il fit pivoter les clés ainsi obtenues, adressant une prière silencieuse à l'Empereur-Dieu de l'Humanité pour que les précieux artefacts s'acquittent de leur tâche sans faillir.

Avec un bourdonnement sourd, d'imposants mécanismes se mirent en branle. Les barres d'adamantium coulissèrent en silence, tandis que la porte d'acier glissait pour s'enfoncer dans le sol. Au-delà, une seconde porte d'acier s'effaça elle aussi, puis une troisième.

Teufelgarten poussa un long soupir de soulagement et pénétra dans la pièce. Celle-ci était éclairée par des torches stylisées, peut-être alimentées au prometheum ; mais l'Inquisiteur n'y prêta pas attention. Son regard était rivé sur le mur qui lui faisait face. D'immenses rayonnages, couverts de livres et de parchemins enluminés. Ivre de joie, excité comme un jeune enfant, l'Inquisiteur se jeta sur le premier ouvrage qui se présenta à lui. Un traité de tactique, relatif à d'obscures batailles du trente-quatrième millénaire.

L'Inquisiteur remit le livre à sa place et explora le Librarium du regard. Il cherchait quelque chose de bien plus ancien. Un texte qui remonterait à dix millénaires, au moment de...

Teufelgarten s'arrêta, interdit. Une vie entière de privations, de cheminement et d'investigation était sur le point de s'avérer payante. D'une main tremblante, il se saisit de l'énorme ouvrage. Celui-ci n'était pas poussiéreux, contrairement aux livres voisins ; sans doute était-il consulté très régulièrement par les Archivistes et les Grand Maîtres du Chapitre. Sur la couverture de cuir noir était frappé le blason des Dark Angels. Et à l'intérieur...

Tout était là. Teufelgarten ne s'était pas trompé, bien au contraire. Et ce qu'il avait suspecté n'était qu'une infime partie de la vérité. Les Dark Angels auraient bientôt des comptes à rendre, car une telle infamie ne pouvait rester impunie. La Très Sainte Inquisition ferait annihiler ce Chapitre impie ; elle disperserait ses cendres et effacerait jusqu'à la dernière trace de son existence maudite.

L'Inquisiteur fut tiré de sa lecture par un bruit sourd. Surpris, il se retourna vivement vers la porte. Et fit face à deux géants en armure.

Les Dark Angels ne lui laissèrent pas le temps de s'expliquer. Avec un claquement métallique, ils armèrent leurs bolters et les pointèrent sur la poitrine de Teufelgarten.


A suivre...

Auteur: Caius Pertinax
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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:09

- Pax Armata, approche autorisée pour arrimage. L'Empereur soit avec vous.

- Reçu, contrôle. Et avec votre esprit.

L'opérateur coupa la transmission et se retourna vers Pertinax. Debout à son poste, le Grand Maître acquiesça distraitement.

- Procédez à l'arrimage.

- A vos ordres, frère Pertinax.

Le croiseur d'attaque prit de la vitesse, glissant lentement vers le vaste hangar qui s'ouvrait devant lui. Le silence régnait sur la passerelle ; mais en dépit de ce calme apparent, Pertinax savait la manoeuvre périlleuse. A tout instant, les rétropropulseurs devaient contrer le champ de gravité du Roc avec précision. Une simple erreur de poussée, et plusieurs milliers de tonnes d'adamantium et d'acier s'écraseraient contre les parois rocheuses de l'astéroïde, condamnant l'équipage à une mort certaine.

Guidé par les signaux de navigation, le Pax Armata s'enfonçait dans les entrailles du Roc. Alors que les ténébres se dissipaient peu à peu, les arsenaux du Chapitre se dessinèrent à travers la vitre blindée.

Des dizaines de vaisseaux s'alignaient le long des poutrelles métalliques, surgissant à peine de la pénombre sous le flash intermittent des feux de navigation. Une myriade de petits appareils s'affairaient de tous côtés, véhiculant les serviteurs de maintenance d'un vaisseau à l'autre pour en poursuivre l'entretien. Une barge de bataille, immense et majestueuse, reposait dans un dock, semblable à un monstre endormi. L'Unrelenting Fury.

Le regard de Pertinax s'attarda un moment sur les lignes du vaisseau, aussi massives qu'élégantes. A elle seule, une barge pouvait balayer des continents et soumettre des planètes entières. Et face à sa silhouette écrasante, le Pax Armata n'était guère qu'un jouet.

Le croiseur d'attaque n'en avait pas moins joué un rôle décisif dans plusieurs conflits armés. Au cours des dernières années, le Pax Armata avait servir de vaisseau d'attache à la IIIe Unité d'Assaut Planétaire. Surgissant à l'improviste au-dessus de mondes hostiles, il avait pu opérer des bombardements précis et lâcher ses modules d'atterrissage au coeur des combats. En maintes occasions, ces frappes chirurgicales avaient ouvert la voie au gros des troupes impériales, épargnant au Haut Commandement des pertes inutiles et considérables.

Pertinax fut tiré de sa rêverie par le rapport monocorde d'un serviteur.


- Arrimage engagé, maître.

- Coupez les moteurs un à six. Stabilisez le vaisseau et armez les ancrages.

- Oui, maître.

Alors que l'équipage achevait d'immobiliser le navire sur son emplacement Pertinax se tourna vers ses sous-officiers. Tous les cinq se tenaient respectueusement au pied de l'estrade, vêtus de robes cérémonielles blanches, leur heaume vert sombre calé sous le bras. D'un hochement de tête, Pertinax leur fit signe d'approcher.

- Mes frères, vous vous êtes couverts de gloire tout au long de cette campagne. Notre mission touche à sa fin, et chacun de vous peut dès à présent regagner sa Compagnie d'origine ; cependant, j'espère avoir l'honneur de vous commander à nouveau, lors d'une prochaine campagne. Puisse l'Empereur guider nos bras...

- ... car lorsqu'il est à nos côtés, nous ne pouvons faillir, complétèrent les Marines à l'unisson.

Quintus, Gabriel, Asdrubal, Silas et Ephrael exécutèrent un salut réglementaire, que Pertinax leur rendit avec un sourire mélancolique. Puis, écartant sa cape, le Grand Maître se saisit de son heaume ailé et s'en coiffa. Le dispositif pressurisé siffla lorsque le casque s'enclencha dans son logement, et c'est d'une voix aux accents métalliques que Pertinax clotura ces brefs adieux.


- Mes frères, je vous confie le Pax Armata. On m'attend.

Les Marines s'écartèrent, inclinant légèrement la tête en signe de respect.

Le commandant de la IIIe Unité d'Assaut Planétaire s'engouffra dans le couloir principal. Tandis que ses pas résonnaient sur le sol de plastacier, il passa en revue les états de service de ses hommes. Silas et Ephrael étaient de bons chefs de section, mais ils manquaient encore un peu d'expérience. Asdrubal méritait sans doute d'être maintenu au poste de premier apothicaire d'une compagnie de combat. Quant aux aides de camp de Pertinax, ils méritaient tous deux d'être promus à des postes de commandement. Si Gabriel brillait par ses talents martiaux, Quintus faisait preuve de compétences tactiques remarquables ; peut-être le temps était-il venu de l'introniser au sein de la Deathwing ?

L'officier franchit le sas de sortie et descendit la rampe inclinée qui le conduirait jusqu'aux docks. Il croisa une véritable armée de serviteurs qui s'élançait pour vider les soutes du navires et les remplir de munitions. Un peu plus loin, une autre équipe d'esclaves mécanisés s'apprêtait à manoeuvrer les énormes tubes de pompage du carburant. Dans quelques jours, tout au plus, le Pax Armata serait prêt à appareiller pour une loitaine région de la Galaxie. Errance et carnage, tel serait le quotidien du croiseur jusqu'à la fin des temps. Jusqu'au retour du Lion.

Pertinax traversa le Grand Hall et formula une prière silencieuse en dépassant la statue du Primarque. Quelle mission urgente le Grand Maître Suprême souhaitait-il lui confier ? Il était peu courant pour un chef d'expédition d'être ainsi convoqué dès son retour. A moins qu'il ne fût l'objet de sanctions. Ses conceptions divergentes avaient-elles finalement valu à Pertinax de tomber en disgrâce ?

C'est donc hanté par de sombres pensées que Pertinax se présenta devant la Première Chapelle. Bien que son armure fût frappée de décorations disctinctives, les plantons firent leur devoir, lui barrant le passage.


- Qui es-tu, frère ? Présente-toi, ou retourne d'où tu viens.

- Grand Maître Caius Pertinax, par la grâce de l'Empereur.

Satisfaits, les gardes s'écartèrent. Pertinax pénétra dans la Chapelle et la traversa d'un bout à l'autre. Arrivé devant l'autel, il emprunta un escalier dérobé et parvint dans la crypte.

A l'exception de quelques chandelles, aucune source de lumière ne venait dissiper les ténèbres. Alors que Pertinax entrait, une autre silhouette se dirigea vers la sortie. Son armure noire ornementée ne laissait aucun doute quant à son office, et Pertinax se découvrit pour marquer le respect dû à tout chapelain. Celui-ci se contenta d'effleurer le Grand Maître d'un regard acéré tandis qu'il le croisait.

Pertinax ignora l'insulte. Il savait que plusieurs chapelains s'étaient opposés à son accession au Cercle Intérieur, jugeant sa tournure d'esprit incompatible avec le poids de la Faute. A vrai dire, Pertinax subodorait même que sa nomination n'était due qu'au soutien discret du Grand Maître Suprême. Pourtant, ce qui l'opposait à ses détracteurs ne tenait qu'à une nuance d'interprétation. Les chapelains-investigateurs clamaient que le pardon de l'Empereur ne serait accordé aux Dark Angels qu'après la rédemption ou l'exécution du dernier Déchu ; aux yeux de Pertinax, la poursuite des Déchus était indissociable d'un service exemplaire aux côtés des autres Légions de l'Empereur.

Ses pairs avaient affiché les mêmes doutes lorsqu'il avait proposé la mise en place des Unités d'Assaut Planétaire. Là aussi, il avait fallu l'autorité du Maître de Chapitre pour leur faire entendre raison. Mais Pertinax entretenait l'espoir qu'un jour les plus récalcitrants de ses frères se laisseraient convaincre.

Sans un bruit, une silhouette s'avança vers Pertinax. La faible lueur des bougies fit apparaître un visage anguleux, rude mais chaleureux. Azrael. Pertinax posa un genou à terre.


- Relève-toi, frère Pertinax. Nous avons à parler.


A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:09

Son heaume calé sous le bras gauche, Pertinax suivit Azrael jusqu'au fond de la pièce. Là, deux silhouettes encapuchonnées polissaient soigneusement un bas-relief de marbre blanc, encastré à même le mur. L'Ange de la Vengeance, figure emblématique du Chapitre et symbole récurrent du credo impérial, à qui la lueur tremblotante des cierges semblait donner vie.

Azrael étudia un instant la sculpture, pensif. Puis il se retourna vers son subordonné et prit la parole sur un ton préoccupé.


- Pertinax, mon ami, nous sommes confrontés à un grand péril. Il y a quelques semaines, le Roc a reçu un invité inattendu en la personne de l'Inquisiteur Teufelgarten, membre distingué de l'Ordo Hereticus.

Comme Pertinax lui jetait un regard interrogateur, le Grand Maître Suprême poursuivit.

- Notre hôte a manifesté le désir d'inspecter notre monastère. Bien évidemment, nous nous sommes pliés à son caprice. Hélas, ce misérable entretenait des arrière-pensées condamnables.

Le visage d'Azrael s'assombrit davantage. Sa voix se fit plus dure.

- Il a déjoué la vigilance de nos sentinelles et pénétré dans le Librarium.

- Ce Teufelgarten a donc percé nos secrets.

- Oui. Mais il n'aura pas l'occasion de les divulguer. Ses suivants ont été exécutés. Quant à Teufelgarten lui-même, je l'ai confié aux bons soins de Frère Asmodaï.

Pertinax hocha la tête d'un air entendu. Tel était le châtiment des ennemis du Chapitre.

- Cependant, poursuivit Azrael, ce fouineur nous a mis dans l'embarras. Même si Teufelgarten agissait de son propre chef, l'Inquisition ne peut feindre d'ignorer la disparition soudaine de l'un des siens. L'Ordo Hereticus n'osera pas lancer d'enquête officielle ; ce serait risquer une confrontation avec les Impardonnés, voire avec l'Adeptus Astartes tout entier. Une violation de l'indépendance des Chapitres serait ressentie comme une provocation par nos frères Marines ; Grimnar lui-même serait capable de se ranger à nos côtés.

Une perspective intéressante. Logan Grimnar était le dirigeant des Space Wolves, éternels rivaux qui jalousaient depuis dix millénaires la supériorité tactique et la pureté génétique des Fils du Lion ; imaginer Grimnar volant au secours de ses ennemis séculaires arracha un sourire amusé à Pertinax.

- L'Ordo ne semble donc pas déterminé à faire preuve d'un zèle excessif, continua Azrael. Pour sauver la face, l'Inquisition doit exiger de notre part une justification crédible. Justification que nous lui fournirons au plus vite pour étouffer l'affaire et permettre aux deux parties d'oublier ce déplorable incident.

- Ces tractations seront menées discrètement, j'imagine.

- En effet. Organiser une réunion au sommet entre l'Inquisition et nous reviendrait à reconnaître l'importance de cet incident, voire à donner l'impression que nous présentons des excuses.

- Ce qui est tout à fait exclu.

- Oui.

Les petites créatures avaient fini de nettoyer le bas-relief. Sans un bruit, elles se retirèrent. Azrael et Pertinax les suivirent du regard tandis qu'elles disparaissaient dans les ténèbres.

Avec un soupir, Azrael posa la main sur l'épaule de Pertinax.


- J'ai besoin de toi pour nous représenter auprès de l'Inquisition.

Pertinax haussa un sourcil. Le Grand Maître Suprême parut s'amuser de sa surprise.

- Vois-tu, Caius, des représentants plénipotentiaires des trois Ordos doivent bientôt se réunir sur la Sainte Terra à l'occasion d'un Concile. Si un haut dignitaire de notre Chapitre venait, par le plus grand des hasards, à se trouver sur Terra à cette occasion, il serait sans doute invité à assister au Concile en signe d'amitié. Et lorsque l'affaire Teufelgarten serait évoquée par l'assemblée - heureuse coïncidence - ce serait l'occasion rêvée pour les Dark Angels d'expliquer le décès accidentel de ce loyal serviteur de l'Empereur.

Pertinax acquiesça. Mais un doute l'étreignait.

- Frère Azrael, pourquoi me choisir pour cette mission ?

- Parce que tu es un brillant orateur, mon frère.

- Et parce que la 3ème Unité d'Assaut Planétaire est la seule force armée de notre Chapitre à s'être battue sous un commandement interarmées sans poursuivre d'objectifs propres ?

Azrael sourit.

- C'est exact. Quitte à envoyer un ambassadeur, je préfère que celui-ci soit apprécié par Terra. Nombre de commandeurs de la Garde peuvent témoigner de ta loyauté envers l'Imperium, et par là dissiper toutes les rumeurs qui courent à notre égard.

- Bien. Et officiellement, pour quelle raison me rendrai-je sur Terra ?

- Mon ami, je crois que tu n'as jamais eu l'occasion de te rendre sur la Sainte Terra, n'est-ce pas ? Voici l'occasion rêvée d'accomplir le pèlerinage que tout Astartes aspire à mener une fois dans son existence.

Un pèlerinage au palais de l'Empereur ! Pertinax se sentit envahi par un irrépressible sentiment de gratitude ; ses inquiétudes se dissipèrent aussitôt.

- Je vous remercie de m'accorder ce privilège, frère Azrael. Je me mets en route dans l'instant.

- Bon voyage, mon ami.

Pertinax exécuta un salut et fit volte-face en se couvrant de son heaume.

Azrael le regarda partir sans mot dire. Il était inutile d'en dire plus à ce brave Caius... son orgueil en aurait été inutilement froissé. Le Grand Maître Suprême avait toujours su que Pertinax ferait un excellent représentant ; s'il l'avait laissé accéder au Cercle Intérieur et au rang de Grand Maître malgré ses opinions divergentes, c'était uniquement dans cette perspective. La création des Unités d'Assaut Planétaire suivait la même logique : elles ne contribuaient certes pas à la chasse des Déchus, mais elles faisaient office d'alibi.

Oui, Pertinax et son unité constituaient une parfaite vitrine. Ils fourniraient une image trompeuse mais flatteuse du Chapitre à ces stupides Inquisiteurs.

Azrael se retourna vers la statue de l'Ange de la Vengeance et éclata de rire.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:10

Un nouvel éclair déchira le ciel, illuminant brièvement le flanc des nuages noirs. L'adepte Igor réprima un gémissement et enfouit son visage dans les replis de sa robe pourpre : les capteurs photoélectriques de ses yeux étaient d'une qualité médiocre, et faute d'obturateurs efficaces, il ressentait durement le moindre flash. Igor ne croyait pas sa présence indispensable, mais quatre siècles de service au sein des Trois Ordres lui avaient enseigné les vertus de la soumission.

L'adepte risqua un coup d'oeil en direction de son maître. Imperturbable et immobile, Sire Mazen se dressait comme une statue dans la tourmente, ses cheveux blonds agités en tous sens par les vents furieux. Le lourd pendentif inquisitorial se balançait autour de son cou, marquant son obédience d'une façon si ostensible qu'elle en était presque ridicule. Bien évidemment, Igor gardait pour lui cette appréciation critique, conscient que Mazen serait bientôt un Inquisiteur à part entière, ce qui lui donnerait pouvoir de vie ou de mort sur quiconque. Mieux valait donc garder sa faveur, tout comme Igor avait su s'attirer la bienveillance de ses dix-huit maîtres précédents.

Une violente rafale déséquilibra l'adepte et manqua de le jeter au sol. Les bâtisseurs de la Spire avaient involontairement construit la plate-forme à l'altitude la plus défavorable, celle où les orages secs atteignaient leur intensité maximale. Mais les tours de la Très Sainte Inquisition se devaient de dominer les ruches maladives où grouillait le bas peuple. En fait, seules les tours de défense et les cathédrales de l'Ecclésiarchie les surpassaient.

Soudain, la masse nuageuse s'entrouvrit. Précédé par un grondement sourd, un Thunderhawk à la livrée verte longeait les flèches gothiques de Sainte-Célimène et se dirigeait vers la plate-forme. Un faisceau de lumière monta à sa rencontre, puis un second, les projecteurs guidant le vaisseau dans sa phase d'approche terminale. Lentement, le mastodonte se laissa glisser au-dessus des structures métalliques et exhiba ses trains d'atterrissage. Contre toute attente, l'engin d'assaut toucha terre avec une grâce qui constrastait avec la rudesse de ses lignes. Igor était habitué aux navettes Aquila, bien plus légères, mais la manoeuvre du Thunderhawk était au moins aussi précise.

Dans un hurlement de vapeur, la rampe avant bascula, révélant une imposante silhouette bardée de métal sombre. Tandis qu'elle s'avançait sur la rampe, le vent s'engouffra dans sa cape et la fit claquer comme un fouet.

Sire Mazen fit un pas en avant.


- Je suis Helvetius Mazen, acolyte de l'Inquisiteur Jovena et en son absence légat plénipotentiaire de la Très Sainte Inquisition. Grand Maître Caius Pertinax, je présume ?

L'Astartes s'arrêta devant l'aspirant Inquisiteur. Il le surplombait de deux bonnes têtes. Son armure de sinople et d'or était surmontée d'un heaume ailé arborant le blason du Chapitre des Dark Angels. Deux pistolets finement ouvragés ceignaient le colosse, tandis qu'une immense épée d'or et de jais était attachée dans son dos.

- En effet.

La voix métallique du Marine résonnait avec force dans la tempête. Mais Mazen ne se laissa pas impressionner.

- Soyez le bienvenu sur Terra, monseigneur. Je suis honoré que vous ayiez accepté notre invitation. La Très Sainte Inquisition se fera un devoir de vous accueillir et de vous loger tout au long de votre pèlerinage.

Le visage de Mazen affichait une froideur et un cynisme qui démentaient le ton cordial de ses propos. Mais Pertinax feignit de ne pas le remarquer.

- Tout l'honneur est pour moi. Je me ferai un devoir de participer à votre Concile.

- Ah, oui. Coïncidence heureuse, n'est-il pas ?

- Certes. Coïncidence heureuse.

Les deux hommes se dévisageaient en silence. Inquiet, Igor trottina au côté de son maître.

- Maître, pourquoi ne pas guider le Seigneur Pertinax jusqu'à ses appartements ?

Mazen ignora son serviteur ; il fixait toujours l'Astartes d'un air de défi. Au terme d'un long silence, il finit par répondre, mais ses paroles étaient chargées d'un mépris abyssal.

- Pas encore, Igor. Messire Pertinax doit d'abord me confier ses armes, comme il sied à un invité. Et de surcroît, il va se découvrir, pour marquer le respect dû à un légat de la Très Sainte Inquisition.

Igor devint cramoisi et manqua s'étrangler. Prudemment, il fit un pas en arrière.


A suivre....

Auteur: Caius Pertinax
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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:12

Pertinax répondit lentement, détachant chaque syllabe pour mieux l'asséner de sa voix de stentor.

- Messire Mazen, sachez que je représente la Première Légion de l'Adeptus Astartes, forte de dix mille ans d'Histoire, et qu'à ce titre je ne rends compte qu'à l'Empereur lui-même. Il est donc tout à fait exclu que je m'incline devant un simple serviteur tel que vous. Par ailleurs, c'est en gage d'amitié que les Dark Angels ont accepté la proposition de vos maîtres ; il ne s'agit en aucun cas d'un acte de soumission.

Mazen s'efforçait de rester de marbre, mais son regard acéré en disait long sur sa frustration. Il allait répliquer, mais le Grand Maître ne lui en laissa pas le temps. L'Astartes empoigna fermement la crosse de ses pistolets et les tira de leurs étuis de cuir.

Inconsciemment, Mazen avait tendu la main vers son arme d'ordonnance ; mais Pertinax se contenta de présenter ses armes au jeune aspirant Inquisiteur : une paire de pistolets à plasma Mk II Sunfury. Des objets de toute beauté - et assurément, de grande valeur. Mazen se détendit, arborant un léger sourire et ouvrant les mains pour recevoir les armes du Dark Angel.

Le Grand Maître lâcha trop tôt. Les deux Sunfury tombèrent au sol, où ils rebondirent plusieurs fois avec fracas avant de s'immobiliser sur le métal noir de la plate-forme. Furieux, Mazen contint sa colère et fit mine d'ignorer l'insulte. Bien évidemment, il était hors de question qu'il se baisse pour ramasser les pistolets : c'eut été perdre la face devant le Marine. Bien décidé à reprendre l'ascendant, il désigna la longue lame noire que Pertinax portait dans le dos.


- Votre épée aussi.

- Certainement pas. L'Epée de Justice n'est pas qu'une arme : c'est le symbole de ma charge et de mon autorité. Armure et épée sont indissociables, elles constituent l'uniforme traditionnel de tout officier de haut rang. Je viens sur Terra en pèlerin ; voudriez-vous que je me présente devant l'Empereur sans les attributs d'un Grand Maître ? Il s'agirait là d'une grave insulte envers moi et mon Chapitre.

Comme Mazen demeurait inflexible, Pertinax poursuivit, agacé.

- Jeune imbécile, croyez-vous que l'Inquisition cautionnera les initiatives maladroites d'un sans-grade, au risque de causer un incident diplomatique majeur avec un Chapitre ?

Mazen serrait les dents, incapable de trouver une répartie. Et pour cause : le colosse avait raison. L'Inquisition souhaitait garder de bonnes relations avec les Dark Angels, et la visite de Pertinax répondait au souhait des deux factions. S'il persisitait à faire du zèle, le jeune acolyte risquait fort de voir son accession au rang d'Inquisiteur retardée de plusieurs années. Pire, il risquait de tomber en disgrâce et de rester à jamais un sous-fifre. La mort dans l'âme, il se résigna à capituler.

- Comme vous voudrez, cracha-t-il d'un ton définitif. Igor, ramasse les armes du Seigneur Pertinax, veux-tu.

Jusque là prostré à bonne distance, le serviteur s'avança avec soulagement.

- Non, intervint Pertinax.

Igor s'immobilisa avec un hoquet de surprise.


- Serviteur, tu vas me conduire à mes appartements. Cet entretien n'a que trop duré.

Sur ce, le Grand Maître fit signe au pilote du Thunderhawk. Les moteurs rugirent tandis que l'appareil s'arrachait à la plate-forme et entamait sa lente ascension dans le ciel saturé d'éclairs. Ivre de rage et de frustration, Mazen vit Pertinax et Igor quitter la plate-forme pour rejoindre la quiétude de la forteresse inquisitoriale. Il demeura bientôt seul dans la tempête.

Le regard du futur Inquisiteur se posa sur les deux Sunfury, qui le narguaient toujours à ses pieds.


- Tu me paieras cet affront, Marine, grinça-t-il entre ses dents. Je te le jure !


A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:13

Pertinax se réveilla en sursaut, la main déjà serrée sur la garde de l'Epée de Justice : la porte s'ouvrait sur une silhouette richement vêtue. Ce n'était pourtant qu'un serviteur.

- Monseigneur, veuillez pardonner mon intrusion. Conformément à votre demande, je vous informe que le jour vient de se lever.

Précision toujours utile sur la Sainte Terra, d'où le ciel n'est que rarement visible. Et a fortiori lorsqu'on se trouve au coeur d'une sombre forteresse de l'Inquisition...

Le Grand Maître congédia le majordome d'un geste de la main. Le serviteur s'inclina respectueusement et sortit de la pièce à reculons, refermant doucement la porte ornementée.

Pertinax s'extirpa du lit à baldaquins et entreprit de revêtir son armure. Tandis qu'il fixait soigneusement les différentes pièces de céramite, il détailla la pièce du regard. Tant de luxe le laissait pantois. Pas un objet, pas un meuble qui ne fût paré d'or ou de joyaux. Les murs eux-mêmes étaient couverts d'un épais capitonnage de soie rouge maintenu par des clous dorés. L'officier aurait aimé croire que cette pièce n'était qu'une exception, et que ses hôtes lui avaient réservé leur plus belle suite. Mais il savait qu'il n'en était rien. Lors de son arrivée, quelques heures plus tôt, il avait suivi Igor le long de corridors superbes et bordés de colonnes de marbre ; il avait dépassé d'immenses statues, témoignages prétentieux à la gloire de quelque Inquisiteur oublié.

A quoi bon tout cela ? Pertinax avait toujours perçu les Inquisiteurs comme les parangons de l'austérité, sentinelles implacables en charge du maintien de leur sacro-sainte doctrine... sans doute fallait-il que l'Inquisition se réservât l'usage de ce qu'elle proscrivait chez les autres. Avec une grimace de dégoût, le Grand Maître maudit ces hypocrites qui osaient menacer les Légions de l'Empereur depuis le calme feutré de leurs palais ; il lui incombait de protéger les secrets du Chapitre contre les basses manoeuvres politiques de ces misérables.

Pertinax s'enveloppa de sa cape et se couvrit de son heaume. La confrontation attendrait ; pour l'heure, il devait s'acquitter de son devoir de pèlerin. L'Epée de Justice au dos, il marcha résolument vers la porte et l'ouvrit à la volée.

Le majordome se tenait à proximité, impassible dans sa livrée rouge et or.


- Monseigneur, je vais vous escorter jusqu'à votre navette.

Pertinax ne jugea pas utile de répondre et se contenta d'emboîter le pas au serviteur. L'idée qu'il eut besoin d'une escorte lui aurait presque arraché un sourire ; mais il se ravisa bien vite. Les corridors interminables se croisaient selon des angles improbables pour constituer un vaste dédale. Ascenseur après ascenseur, escalier après escalier, le Grand Maître et son guide s'enfonçaient dans les entrailles de l'édifice. Au terme d'un long cheminement, ils se trouvèrent soudain à l'extérieur, sur une plate-forme d'atterrissage juchée à haute altitude.

Un transport Aquila frappé du sceau de l'Inquisition y attendait son passager, tous moteurs à plein régime. Pertinax ignora le majordome qui lui souhaitait une bonne journée, s'engouffrant dans la cabine de la navette prête au décollage. Presque aussitôt, l'Aquila s'arracha à la plate-forme pour entamer un virage serré dans les nuages.

Le Palais Impérial se trouvait à bonne distance de là, et il aurait été vain de vouloir s'y rendre à pied. C'était pourtant le seul choix des pèlerins ordinaires, contraints de parcourir par eux-mêmes les centaines de kilomètres qui séparaient leur but du spatioport le plus proche. Tandis que l'Aquila réduisait son altitude, Pertinax en eut la confirmation au travers du vitrage blindé.

Une véritable foule grouillait entre les bâtiments de pierre, loin en-dessous de l'appareil. Pour la plupart, les citoyens vaquaient à leurs occupations laborieuses au service de l'Administratum. Mais un peu plus loin sur la droite, on distinguait clairement un fleuve humain, populace innombrable et bigarrée serpentant lentement vers les lointaines tours du Palais Impérial. Tant de piété ravissait Pertinax et l'inquiétait à la fois. Que tant d'hommes et de femmes fussent capables d'abandonner leur foyer pour se livrer à un périple si long et si dangereux dénotait une indéfectible loyauté envers l'Empereur ; et pourtant, c'était aussi le signe d'une adoration servile et coupable. Celui qui vénère l'Empereur en tant qu'homme est louable, car il se soumet à son semblable par respect et par admiration de Ses actes ; celui qui Le vénère en tant que Dieu n'est qu'un pion guidé par la peur et l'ignorance, un pion qui pourrait tout aussi bien vénérer d'autres divinités si l'occasion s'en présentait.

Pertinax fut tiré de sa rêverie par l'irruption bruyante de deux Thunderbolt. Les chasseurs coupèrent la trajectoire de l'Aquila en signe d'avertissement, puis vinrent se poster de part et d'autre du transport en attendant son identification. Les trois appareils maintinrent leur cap quelques minutes, cependant que le paysage continuait à défiler rapidement sous les yeux du Grand Maître. Puis les Thunderbolt virèrent de bord, reprenant leur patrouille autour du Saint Edifice.

Tandis que l'Aquila ralentissait et entamait sa descente, le Palais apparut soudain dans toute sa splendeur. De colossales murailles se dressaient d'un bout à l'autre de l'horizon, délimitant une forêt de tours blanches crevant le ciel de leurs flèches acérées. Aussi loin que portait la vue, le Palais Impérial étendait son écrasante immensité. La légende voulait qu'il fût le plus grand édifice de la Galaxie ; ce n'était pourtant pas tout à fait exact. Si le Palais Impérial couvrait en effet la totalité de l'ancienne Europe, il ne pouvait rivaliser avec les Mondes-Forges de l'Adeptus Mechanicus, vastes villes-usines de la taille d'un monde. Néanmoins, et en dépit des incroyables merveilles qu'il avait pu rencontrer lors de ses campagnes, Pertinax était émerveillé. Là, sous ses yeux, sommeillait l'Empereur de l'Humanité, Seigneur de toutes choses et Chef Suprême des Légions Astartes ; en ce lieu mythique s'était déroulée la plus grande bataille de l'Histoire, celle qui avait vu la chute d'Horus et de ses sbires.

L'Aquila se posa doucement sur une aire aménagée à quelque distance de la porte principale. Alors qu'il s'extirpait de la navette, le Grand Maître constata que tout autour de la plate-forme était déployé un cordon de protection. Des dizaines de policiers de l'Adeptus Arbites se dressaient face à la foule pour empêcher la masse aveugle de submerger les quelques navettes qui y stationnaient. De temps à autre, un malheureux pèlerin s'approchait un peu trop et recevait quelques bons coups de crosse en guise de sanction. Un autre contingent d'Arbites, plus important, maintenait la garde devant l'immense porte du Palais.

Une silhouette sombre se dirigeait vers l'officier Dark Angel d'un pas pour le moins martial. Vêtu d'un ample manteau de cuir noir, l'homme salua Pertinax de façon impeccable.


- Capitaine-commissaire Werner Von Ravenstein, à votre service. Nous sommes honorés de votre visite, monseigneur.

- Grand Maître Caius Pertinax, du Chapitre des Dark Angels. Je suis honoré par votre accueil, capitaine-commissaire.

L'Arbites hocha la tête avec satisfaction et invita Pertinax à le suivre.

- L'Inquisition nous avait prévenus de votre arrivée, et nous vous attendions. Dans la mesure du possible, nous essayons de grouper les dignitaires pour faciliter leur passage au travers de la populace.

Von Ravenstein s'arrêta au bord de la plate-forme. Plusieurs hautes personnalités s'y tenaient, leur regard agacé manifestant leur impatience de façon aussi silencieuse qu'ostensible.

- Messire Pertinax, voici la Comtesse Dolokine, du Grand-Duché de Delmian ; le Généralissime Pollant, commandant la IVe Armée ; le Lexmécanicien en chef Lucretius, du Clergé de Mars ; l'Adepte de Première Classe Sigalius, de l'Administratum ; et le Maître de la Foi Thargannis, du Chapitre des Black Templars.

Les deux Space Marines se saluèrent d'un hochement de tête, moins par sympathie que par respect. Un différend opposait les deux Chapitres depuis quelques années ; les Black Templars s'étaient immiscés dans les affaires privées des Dark Angels, ce qui avait contraint les Impardonnés à lancer de vives représailles à l'encontre d'un navire templier.

- Bien, suivez-moi, reprit Von Ravenstein. Nous allons vous ouvrir un passage.


A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:14

- En formation !

Réagissant instantanément à l'ordre de leur capitaine-commissaire, les Arbites s'élancèrent au-devant de la porte, formant une solide ligne d'uniformes noirs face à la foule en marche. Ici et là, quelques pèlerins osèrent émettre une protestation ; ils furent aussitôt roués de coups et réduits au silence. Puis la phalange noire fit mine d'avancer, repoussant pas à pas la masse humaine à grands renforts de coups de crosse. Von Ravenstein lui-même n'était pas en reste, jouant de la matraque pour donner l'exemple à ses troupes. Les pèlerins finirent par refluer sous la violence de l'assaut, libérant l'accès au Palais.

Pertinax suivit les autres dignitaires vers la large porte. La Comtesse Dolokine semblait ravie que sa longue attente fût enfin terminée ; en tout cas, elle ne manquait pas de le faire savoir. Apparemment persuadée que son auditoire buvait ses paroles, elle déversait un flot ininterrompu de banalités de sa voix aigrelette. Tandis que le petit groupe suivait la muraille sous le couvert du rideau policier, Pertinax se réfugia dans l'introspection. A dire vrai, il était impressionné par le sang-froid des Arbites : le capitaine-commissaire et ses hommes se dressaient seuls face à plusieurs dizaines de milliers de civils et parvenaient malgré tout à maîtriser la situation sans trop de difficulté. Certes, les pèlerins ne constituaient jamais qu'un troupeau servile affaibli par des semaines de marche et de privations ; mais leur nombre était suffisant pour transformer tout mouvement de panique en une vague irrésistible que rien n'aurait pu contenir.

Comme pour donner raison à Pertinax, un début d'agitation se fit jour dans la foule. Le gros de la populace continuait à avancer, incapable de deviner que les premiers rangs avaient stoppé à quelques pas du Saint Edifice. Pris au piège, les rangs intermédiaires étaient écrasés dans un véritable étau ; quelques malheureux vinrent à trébucher, et furent aussitôt piétinés à mort malgré des hurlements désespérés. Lentement, la masse humaine reprit sa progression vers l'avant.


- En joue ! lâcha Von Ravenstein.

Comme un seul homme, les Arbites pointèrent leurs fusils. Terrorisés, les pèlerins des premiers rangs voulurent fuir, poussant de toutes leurs forces vers l'arrière pour freiner le mouvement. En vain : la foule continuait à avancer.


- Feu !

Dans une gerbe de détonations, la salve coucha les trois premiers rangs. Les Arbites utilisaient traditionnellement des cartouches perforantes à haute vélocité, histoire d'éliminer à coup sûr les criminels récalcitrants ; sur une foule compacte et dépourvue de protection, les effets de ces munitions étaient épouvantables. Les pèlerins refluèrent, à toutes jambes cette fois-ci : le bruit des coups de feu avait retenti suffisamment loin pour entraîner un mouvement général.

- Feu !

La seconde salve frappa les fuyards dans le dos et en déchiqueta un bon nombre. La Comtesse gloussa, sans doute amusée par la vue de ces manants qu'on réduisait en charpie.

- Halte au feu, intervint Von Ravenstein. Ramassez-moi ces macchabées et reformez les rangs !

Tandis que les Arbites se déployaient pour repousser les cadavres sur le bas-côté, le capitaine-commissaire accompagna ses hôtes jusqu'à la porte.

- Veuillez excuser cet incident. Aucun de vous n'est blessé, j'espère ?

- Pensez-vous, répondit la Comtesse avec une moue enjôleuse, c'était fort distrayant. Allons, Von Ravenstein, vous êtes bien galant homme, en vérité. Vous Nous ferez bien le plaisir de Nous accompagner pendant cette visite ?

- Hélas non, madame, je crains de ne pouvoir pénétrer dans le Palais Impérial. Il s'agit là d'une prérogative exclusive de l'Adeptus Custodes.

Sur ces mots, le capitaine-commissaire exécuta un bref salut et retourna parmi ses hommes. Dolokine haussa les épaules et s'engouffra dans le Palais, bientôt imitée par les autres dignitaires.

Ils marchaient le long d'un large couloir. Incroyablement haut de plafond et bordé de statues cyclopéennes, celui-ci se reflétait tout entier dans le sol de marbre poli. Il en résultait une impression étrange de volume et de lumière : Pertinax et les autres semblaient flotter dans les cieux. En dépit de son immensité, le corridor était pourtant d'une sobriété frappante. Nulle fantaisie colorée ne venait troubler la froide splendeur de ces lieux. En un sens, Pertinax retrouvait la grandeur et la gloire des halls du Roc ; mais tandis que la Tour des Anges était plongée dans une pénombre éternelle, le Palais Impérial baignait dans une douce lumière blanche.

Hélas, la Comtesse Dolokine ne tarda pas à retrouver ses esprits ; sitôt l'émerveillement passé, elle reprit le cours de son monologue. Visiblement désireux de ne pas être choisi pour confident, le Généralissime Pollant vint marcher aux côtés du Dark Angel.


- Messire Pertinax, je peux me tromper, mais ne seriez-vous pas le commandant de la IIIe Unité d'Assaut Planétaire ?

- En effet.

Etonné d'être ainsi reconnu, Pertinax s'intéressa pour la première fois à son interlocuteur. Pollant était un petit homme trapu et sans âge, littéralement couvert de médailles et vêtu d'un long manteau sur son uniforme olive. Les cheveux argentés du Généralissime contrastaient avec la jeunesse apparente de ses traits, ce qui trahissait à coup sûr un usage intensif de drogues Juvenat. Pour autant, et même si l'essentiel de son visage disparaissait sous la visière de sa casquette honorifique, Pollant avait un regard perçant qui débordait de vivacité.

- Dans ce cas, je vous présente mes respects au nom de mon état-major. Peut-être vous rappelez-vous le 112ème Cadien, qui se battit sur l'un de vos flancs lors de la campagne d'Hécate, il y a trois années de cela ? Ce régiment faisait partie de mes effectifs.

Tandis que Pollant parlait, ses mains gantées de cuir couraient le long de son bâton de maréchal. Sans doute l'évocation de batailles passées réveillait-elle chez lui une certaine nostalgie des combats. Pour Pertinax, il n'y avait cependant pas de quoi pavoiser : il se rappelait parfaitement les piètres performances du 112ème Cadien. Les Dark Angels avaient compté sur cette unité mécanisée pour boucler l'encerclement d'un contingent rebelle et permettre à la IIIème Unité d'Assaut Planétaire d'écraser l'ennemi sans coup férir. Malheureusement, le moral du 112ème avait flanché dès les premières escarmouches, et le régiment avait battu en retraite malgré des pertes minimes. Pertinax avait finalement obtenu la reddition des rebelles, mais ceux-ci auraient pu profiter de la brèche pour se dégager et gagner une position fortifiée. Il s'en était fallu de peu.

- Oui, je me souviens très bien de cette unité.

Le Grand Maître préféra ne rien ajouter, soucieux de ne pas humilier le Généralissime inutilement. Sans se démonter, ce dernier hocha la tête et poursuivit son propos.

- Eh bien, sachez que le 112ème a été détruit l'année dernière, laminé par une invasion ork. Et ce n'est pas une grand perte. Il faut bien avouer que ce régiment ne valait pas tripette : une chaîne de commandement valable, un équipement de qualité, mais les hommes n'avaient pas la trempe de vrais soldats.

Pertinax regretta aussitôt d'avoir douté de la lucidité de Pollant. Les hauts officiers de la Garde avaient pour habitude de se gargariser avec une suffisance ronflante, tout juste égalée par leur incompétence. Mais le Généralissime était d'une tout autre étoffe... ce qui lui attira immédiatement la sympathie du Grand Maître.

Entre temps, Dolokine semblait s'être lassée de la compagnie du Lexmécanicien. Tout comme son comparse de l'Administratum, Lucretius se montrait peu disert et ne répondait aux plaisanteries de la Comtesse que par des hochements de tête inexpressifs. Vexée, Dolokine décida de reporter ses faveurs sur le Chapelain Thargannis, lequel accueillit ce privilège avec un silence résigné.


- Voilà des décennies que je n'avais pas eu de permission, continuait Pollant.

Le Généralissime fit claquer son bâton sur la base de sa jambe droite, qui émit un bruit métallique retentissant. Pollant eut un rire sans joie.


- Cinquante ans au service de l'Empereur, et c'est mon premier membre cybernétique. A mon âge, les greffes ne prennent pas très bien ; ces foutus médecins m'ont contraint au repos. Du coup, j'en profite pour faire mon pèlerinage... à quelque chose malheur est bon !

Le petit groupe atteignait une portion du couloir dédiée aux Primarques. De part et d'autre de l'allée centrale, les statues se faisaient face avec solennité. Il ne s'agissait pas d'images pompeuses des grand héros de l'Imperium ; évitant ce lieu commun quelque peu vulgaire, les sculpteurs avaient choisi de placer chaque Primarque au centre d'une allégorie qui présentait au visiteur son oeuvre majeure ou son rôle historique. Même la disposition des statues s'inscrivait pleinement dans cette optique et concourait à l'aspect narratif de l'ensemble. Ainsi, le Lion faisait face à Leman Russ, son regard pensif et sérieux pointé comme un défi vers le barbare rugissant ; un peu plus loin, Rogal Dorn dévisageait Roboute Guilliman, lisant avec scepticisme le Codex Astartes brandi par le Primarque des Ultramarines.

Pertinax et le Généralissime observèrent un silence respectueux tandis qu'ils dépassaient les sculptures monumentales. Puis Pollant reprit le cours de ses pensées.


- Et vous, messire Pertinax ? Je suis toujours étonné de voir des Astartes de votre rang si loin de leur Légion.

- Je jouis d'une autorisation spéciale de mon Chapitre. Le pèlerinage est un devoir sacré pour tout serviteur de l'Empereur, quel que soit son rang.

- Je vois, je vois... Dommage que votre visite coïncide avec la tenue du Concile inquisitorial. Je ne puis imaginer perspective plus ennuyeuse que de côtoyer des Inquisiteurs plusieurs jours durant.

Pertinax contint son agacement, mais son ton se fit plus rude.

- Comment savez-vous que je dois participer à ce Concile ?

Pollant eut l'air sincèrement surpris par la réaction du Grand Maître.

- Ma foi, c'est votre homologue Black Templar qui nous en a parlé tout à l'heure.

- Vraiment ? Je suis étonné qu'un chapelain Black Templar soit si bien renseigné sur mes allées et venues.

- Il n'y a là rien de secret : deux insignes représentants de l'Adeptus Astartes étant de passage sur Terra, il semble naturel que l'Inquisition les invite à sa petite sauterie.

Pertinax étrécit les yeux sous son heaume. Ainsi, ce Thargannis devait également participer au Concile. Pourquoi n'en avait-il pas été informé ? L'Ordo Hereticus avait-il sciemment dissimulé cette information aux Dark Angels ? Dans l'absolu, il n'y avait rien d'étonnant à ce qu'un chapelain vienne en pèlerinage sur la Sainte Terra ; plus que tout autre Astartes, il se devait d'entretenir sa foi et son bien-être spirituel. Mais que le seul autre Marine invité au Concile fût un Black Templar relevait d'une coïncidence pour le moins curieuse. Peut-être le Chapitre à la croix noire était-il lui aussi l'objet d'une enquête inquisitoriale ? A moins que la présence de Thargannis ne fût liée à la venue de Pertinax...

Le Dark Angel sentit son sang se glacer.

... à moins que Thargannis ne fût un témoin à charge.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:15

La luminosité décrût soudainement : le couloir débouchait sur une pièce sombre aux proportions gigantesques. De forme circulaire, celle-ci s'étendait sur une telle surface qu'elle aurait pu abriter une ville entière sous son vaste dôme. Une myriade de torches couvrait les hauts murs de pierre ; petites et lointaines, les flammes dansaient dans la pénombre comme autant d'étoiles dans la nuit.

Une foule innombrable s'entassait religieusement au pied d'un immense édifice pyramidal. Engendrés par le souffle haletant de milliers de pèlerins, des nuages de condensation dérivaient paresseusement sous le dôme, retombant parfois en pluie sur la masse grouillante des fidèles.

Le petit groupe de dignitaires se figea sur place, réduit au silence par un tel spectacle. Dans son émerveillement, Pertinax remarqua de petites créatures ailées qui voletaient de-ci de-là ; il dut faire usage des auspex de son heaume pour reconnaître des chérubins mécanisés. Ceux-ci surveillaient la foule d'un oeil attentif, à l'affût du moindre comportement suspect. A n'en pas douter, il leur suffisait d'un signe pour alerter les Custodiens qui régnaient en maîtres sur ce lieu sacré.

Tandis qu'il reprenait la marche à la suite de ses compagnons de pèlerinage, le Grand Maître revint aux interrogations qui le taraudaient. L'Inquisition voulait-elle transformer le Concile en procès et soumettre à jugement le Chapitre des Dark Angels ? Cela défiait toute logique. Azrael n'avait-il pas envoyé Pertinax sur Terra dans un souci de bonne entente avec l'Inquisition ? Aux dires du Grand Maître Suprême, l'Ordo Hereticus souhaitait uniquement sauver la face et ne demandait qu'à croire les explications apportées par Pertinax quant à la disparition de Teufelgarten. Alors, pourquoi convoquer un Black Templar en sus ?

Pertinax fronça les sourcils. Il se faisait peut-être du souci pour rien ; après tout, si l'Inquisition cherchait à faire tomber les Dark Angels en disgrâce, il lui suffisait de faire comparaître un Space Wolf. Les barbares sans cervelle de Fenris auraient sans doute beaucoup à dire au sujet des Fils du Lion.

Mais quelle crédibilité auraient-ils ? La rivalité qui opposait Dark Angels et Space Wolves était aussi ancienne que l'Imperium ; et nul ne l'ignorait sur Terra. En revanche, le différend causé par la destruction de l'Ophidium Gulf des Black Templars était d'une nature bien plus confidentielle, car ni les Dark Angels ni les Templiers n'avaient souhaité en faire étalage. De fait, le témoignage à charge d'un Black Templar paraîtrait tout aussi objectif que celui d'un autre Astartes. Etait-ce à dire que certains membres de l'Inquisition avaient eu vent du conflit larvé qui opposait les deux Chapitres et avaient décidé d'en tirer parti ? Le seul moyen de le savoir avant la tenue du Concile était sans doute de mener une entrevue discrète avec le chapelain Thargannis. Hélas, celui-ci était en grande conversation avec Dolokine ; ou plutôt, il subissait avec flegme le soliloque interminable de la Comtesse.

Les dignitaires progressaient au milieu de la populace en prière. Les pèlerins issus du bas peuple devaient en effet s'arrêter devant la pyramide ; seuls les citoyens impériaux de haut rang pouvaient entreprendre l'ascension de son grand escalier et se présenter devant la Porte d'Eternité. Quiconque viendrait à violer cette loi sacrée goûterait au tranchant des hallebardes de l'Adeptus Custodes.

Entre temps, les bons mots de la Comtesse n'avaient pu arracher au Black Templar le moindre rire, ni même un vague témoignage de sympathie. Jetant un rapide coup d'oeil aux alentours, Dolokine ne tarda pas à remarquer que Pertinax était isolé. Faute de mieux, elle obliqua vers lui, le gratifiant d'un large sourire. L'officier Dark Angel tenta de l'ignorer, mais il en fallait plus pour décourager la noblesse impériale.

Synnia Dolokine était une jeune femme de grande taille, à la silhouette fine, et plutôt séduisante malgré l'épais maquillage qui dissimulait ses traits. Vêtue de riches étoffes colorées, couverte de bijoux précieux, elle affichait son rang avec fierté et discourait avec passion de sujets qu'elle ne connaissait pas. Pertinax ne tarda pas à fermer son esprit, laissant les mots ricocher sans effet sur ses oreilles.

Le Généralissime Pollant fut le premier à atteindre le grand escalier. De part et d'autres des innombrables marches, d'antiques bannières et étendards s'alignaient à perte de vue, témoignages solennels à la gloire de régiments aujourd'hui disparus ou de héros tombés au champ d'honneur. Ici ou là trônait un casque, une épée ou quelque relique ayant appartenu à un courageux serviteur de l'Empereur.


- Bon, lâcha la Comtesse, voilà qui fut fort intéressant, et je m'en retournerai comblée par ce pèlerinage. Faisons donc demi-tour, nous avons vu tout ce qu'il y avait à voir ; franchement, qui s'intéresse à ces oripeaux poussiéreux et autres breloques sans valeur ?

Silence et consternation s'abattirent sur les dignitaires comme la foudre. Tous firent volte-face, dévisageant Dolokine avec stupeur. Pollant suffoquait de rage, comme en attestait son visage cramoisi. La Comtesse éclata de rire.

- Allons, Pollant, vous n'allez pas nous faire une...

- SILENCE ! rugit Pertinax.

La jeune femme sursauta et amorça un mouvement de recul tandis que le Grand Maître avançait sur elle.


- Comment osez-vous souiller la mémoire des héros qui ont forgé notre glorieux Imperium ? C'est une insulte à l'Empereur Lui-même !

Pertinax écarta un pan de sa cape pour se saisir de l'Epée de Justice. Prise de terreur, Dolokine trébucha. Agitée de sanglots, elle rampa sur quelques mètres avant de réussir tant bien que mal à se mettre à genoux et à bredouiller quelques excuses. De chaudes larmes coulaient le long de ses joues, détruisant le long travail de maquillage pour lui donner un aspect grotesque.

- Mes mots... mes mots ont dépassé ma pensée. Je... je vous présente mes plus humbles excuses, mes seigneurs.

Mes seigneurs ? Tournant la tête, Pertinax constata que Thargannis se tenait à côté de lui. Des poings du chapelain avaient jailli de longes griffes crépitantes ; de toute évidence, le Black Templar envisageait lui aussi de mettre un terme à l'existence de la Comtesse.

Les deux Astartes se dévisagèrent un instant. Le Dark Angel rengaina sa lame ; Thargannis rétracta ses griffes d'adamantium. Dolokine en profita pour déguerpir sans demander son reste, trop humiliée pour songer à tenir son rang face aux autre dignitaires. Pertinax la laissa disparaître dans la foule ; il fixait Thargannis.


- Je vois que nous avons quelques valeurs communes, frère chapelain.

- Nous sommes tous au service de l'Empereur, rétorqua le Black Templar d'une voix glaciale.

- Et nous devons tous deux honorer une invitation de l'Inquisition. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une coïncidence.

- Je ne suis qu'un humble pèlerin de passage sur la Sainte Terra. Le hasard a voulu qu'un Concile se tienne au même moment. Pourquoi ? Tes raisons seraient-elles... différentes, frère Dark Angel ?

Pertinax réprima une grimace. Il fixait toujour le heaume à tête de mort du chapelain, symbole de sa charge et de son dévouement à l'Empereur.

- Non. Je ne suis moi-même qu'un simple pèlerin.

- Dans ce cas, conclut Thargannis, il faut bien admettre qu'il s'agit d'une coïncidence.

Les deux Astartes se tenaient face à face, les regards rivés l'un à l'autre en signe de défi. Aucun des deux officiers ne pouvait détourner la tête sans sacrifier à son honneur ; aucun des deux ne pouvait s'attaquer à l'autre sans devenir coupable aux yeux de Terra.

Par bonheur, Pollant avait compris ce qui se tramait. Il intervint avec une fausse bonhomie qui ne trompa personne mais eut au moins le mérite de briser le statu quo.


- Bon débarras, mes seigneurs. Cette harpie m'était insupportable. Mais n'est-ce point la garde custodienne que j'aperçois là-haut ?

Saisissant l'excuse offerte, les Astartes se retournèrent vers le grand escalier. A mi-hauteur de la pyramide se dressaient deux imposantes silhouettes. Les hallebardes Nemesis et les armures d'or surmontées de cimiers rouges les désignaient à coup sûr comme des membres de l'Adeptus Custodes, la garde personnelle de l'Empereur. Chacun de ces hommes était un combattant d'élite, un guerrier exceptionnel à même de rivaliser avec les meilleurs Dark Angels.

Pertinax, Thargannis, Pollant, Lucretius et Sigalius entamèrent l'ascension des marches. La pyramide s'élevait haut, très haut sous le dôme ; elle dépassait même les nuages de condensation et surplombait la foule massée en contrebas. Combien de bannières sacrées, combien de saintes reliques étaient-elles entreposées ici ? Combien de soldats mourraient encore pour la gloire de l'Empereur ? Pertinax n'aurait su le dire. Chaque jour, des millions d'hommes et de femmes périssaient pour le salut de l'Imperium. Il en était ainsi depuis dix millénaires, et il serait ainsi jusqu'à la fin des temps.

Les dignitaires parvinrent enfin au sommet des marches. Là, devant eux, se dressait la Porte d'Eternité, si haute et si large qu'un Titan aurait pu la franchir. Pourtant, nul ne savait ce qui se trouvait au-delà, à l'exception des Custodiens et de quelques rares élus qui, seuls, avaient le droit de pénétrer dans le Saint des Saints.

Satisfaits, le Lexmécanicien et l'Adepte de Première Classe rebroussèrent chemin. Mais pour Pollant et les deux Astartes, le pèlerinage n'avait pas encore touché à son terme. La tradition voulait que tout combattant de haut rang se présentât devant la Porte d'Eternité pour demander audience à l'Empereur ; bien sûr, la demande était toujours refusée, mais elle n'en était pas moins incontournable.

Le Généralissime était épuisé par son ascension, et les deux Astartes le soutinrent sur les derniers mètres. Haletant, le visage luisant de sueur, Pollant ôta sa casquette et posa un genou à terre. Pertinax et Thargannis l'imitèrent, se découvrant devant les douze Custodiens en faction.


- Qui es-tu ? demanda l'un des gardes de sa voix tonitruante.

Pollant se redressa, brandissant son bâton de maréchal.


- Je suis le Généralissime Pollant, commandant la IVe Armée. Je demande audience à l'Empereur.

Pertinax se dressa à son tour. D'un geste vif, il dégaina l'Epée de Justice et la leva devant lui.

- Je suis le Grand Maître Caius Pertinax, du Chapitre des Dark Angels. Je demande audience à l'Empereur.

Thargannis se leva lui aussi. Il se saisit de son Crozius Arcanum et le présenta aux Custodiens.

- Je suis le Maître de la Foi Thargannis, du Chapitre des Black Templars. Je demande audience à l'Empereur.

Un long silence leur répondit. Puis le garde reprit la parole.

- Soldat, l'Empereur a entendu ta requête. Il ne te recevra pas, mais désormais Sa bénédiction t'accompagnera à jamais. Va, retourne d'où tu viens.

Les trois officiers s'inclinèrent et firent demi-tour. Un long chemin les attendait jusqu'à l'extérieur, sans parler du vol de retour jusqu'à leurs logements respectifs. Ainsi s'achevait le pèlerinage sur Terra. Pertinax était empli de fierté, mais au fond de lui subsistait une vague déception. Il aurait tant aimé franchir la Porte d'Eternité !



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:16

Pertinax se leva d'une humeur maussade : il n'aurait pas imaginé devoir utiliser son nodule cataleptique au cours d'une mission diplomatique. Bien sûr, le Grand Maître ne souffrait pas à proprement parler du manque de sommeil, mais plutôt de la contrariété occasionnée par la tournure des évènements. Car le Concile se présentait sous un jour nouveau : en lieu et place d'un règlement à l'amiable, les Ordos semblaient privilégier l'affrontement. A ce titre, la présence du chapelain Thargannis attestait des intentions hostiles de l'Inquisition à l'égard des Dark Angels.

Dès son retour du Palais Impérial, Pertinax avait procédé à une inspection poussée de ses appartements. Les auspex de son heaume n'avaient pas tardé à identifier des appareils d'écoute, soigneusement dissimulés derrière les tentures de soie. De toute évidence, la nature prétendûment cordiale de l'invitation inquisitoriale n'était qu'un piège grossier destiné à endormir la vigilance des Impardonnés et à prendre leur ambassadeur au dépourvu. Azrael lui-même ne s'était-il pas laissé berner par les discours mielleux de ses interlocuteurs ? Désormais, Pertinax était résolu à ne baisser sa garde en aucune circonstance.

Le Concile devait se tenir dans un ancien monastère de l'Ecclésiarchie situé non loin de la tour inquisitoriale, aussi l'officier Dark Angel décida-t-il de s'y rendre à pied. Au terme d'un interminable cheminement le long de couloirs sans fin et d'escaliers vertigineux, Pertinax parvint à s'extirper du dédale oppressant de la forteresse et à gagner l'extérieur. Le bas peuple vaquait à ses occupations, grouillant et vociférant dans les rues moites. En dépit des filtres respiratoires de son armure, le Grand Maître pouvait sentir une puanteur âcre attaquer ses narines. Il se sentait infiniment plus à l'aise en ces allées surpeuplées que dans le luxe opulent des édifices inquisitoriaux ; pour la première fois depuis son arrivée sur Terra, Pertinax pouvait échapper aux courbettes faussement révérencieuses de ses hôtes et se mêler aux citoyens ordinaires du siège impérial.

Sur la Sainte Terra, au coeur d'un quartier dominé par les hautes tours de l'Inquisition, la population était appelée à côtoyer les dignitaires de haut rang ; pourtant, la foule s'écartait devant Pertinax, lui ouvrant respectueusement un passage. De temps à autre, un citoyen particulièrement fervent baissait la tête, accompagnant ce geste de dévotion d'une prière murmurée du bout des lèvres.

A bien y réfléchir, il n'y avait là rien d'étonnant. Depuis l'Hérésie, aucun Chapitre n'était autorisé à déployer des troupes sur Terra sans l'assentiment direct des Hauts Seigneurs. Ainsi, le bas peuple pouvait s'habituer aux allées et venues des cardinaux, des nobles et des diplomates, mais les Space Marines resteraient à jamais auréolés de légende à ses yeux. Comment pouvait-il en être autrement sur un monde où chaque monument, chaque statue chantait la gloire des Légions de l'Empereur et de leur victoire finale sur le Renégat Horus ?

Pertinax obliqua sur la gauche et s'engouffra dans une grand-rue qui longeait le mur d'enceinte du monastère. Les pierres blanches, mal dégrossies et usées par le temps, contrastaient avec la splendeur sinistre des bâtiments avoisinants. Et pourtant, l'édifice religieux éclipsait tous les autres tant sa clarté le mettait en valeur. En guise de porte, le mur présentait une simple ouverture surmontée de bas-reliefs décatis. Le Grand Maître tenta d'en identifier le motif, mais en vain : les nouveaux propriétaires n'avaient pas daigné l'entretenir, et l'arche tout entière ne tarderait pas à s'effondrer sous le poids des ans.

Au-delà du mur d'enceinte, une promenade couverte entourait un vaste jardin. Pertinax en fut abasourdi : le sol de Terra était stérile depuis des millénaires, bien trop acide pour accueillir le moindre brin d'herbe. Par quel prodige cet ilôt de verdure était-il préservé dans la pénombre des ruches surpeuplées ? Tandis qu'il marchait le long de la promenade, le Dark Angel laissa son regard vagabonder sur les colonnes de pierre qui bordaient le chemin. Bien qu'irrémédiablement abîmées par l'atmosphère délétère, celles-ci arboraient encore fièrement la fleur de lys de l'Adepta Sororitas.

Ainsi donc, le monastère était en fait un couvent. Comment l'Ecclésiarchie avait-elle pu céder un tel édifice à l'Inquisition ? Les cardinaux clamaient à l'envi que leur étroite collaboration avec l'Ordo Hereticus résultait de leurs idéaux communs de respect de la sacro-sainte doctrine impériale. Mais en pratique, cette collaboration se manifestait souvent par une prudente soumission de l'Ecclésiarchie aux ordres d'un Inquisiteur de passage. Quel triste sort pour les soeurs de bataille que de voir leurs installations militaires ainsi livrées en pâture aux laquais des trois Ordos ! A n'en pas douter, tel était le sort que l'Inquisition réservait au Roc et à l'ensemble des forteresses-monastères de l'Adeptus Astartes.

Pertinax atteignit enfin le bâtiment principal. L'essentiel de l'espace intérieur était occupé par le grand amphithéâtre où devait se tenir le Concile. Bien que Pertinax fût en avance sur l'heure prévue, il constata que de nombreux Inquisiteurs l'avaient précédé. Vêtus de costumes hétéroclites et colorés, hommes et femmes se livraient à de discrets conciliabules. Chaque groupe se tenait soigneusement à l'écart des autres, jetant de temps à autre un regard inquiet aux alentours. Bien avant l'ouverture officielle des discussions, des alliances étaient forgées et des votes arrangés. Thargannis était là, lui aussi, en grande conversation avec un trio de vieillards. L'assemblée en elle-même ne serait-elle donc qu'une mascarade, un vulgaire simulacre de débat ? Pertinax s'était attendu à de telles simagrées, mais son dégoût n'en était pas moins grand ; aussi prit-il le parti de se diriger sans mot dire vers le premier rang de sièges. Là, il choisit une place au hasard et s'y assit prestement.

Il attendit un long moment que ses hôtes se décidassent à mettre un terme à leurs tractations. Finalement, les groupes se dispersèrent, et chacun regagna sa place dans un indescriptible brouhaha. Tandis que l'amphithéâtre retrouvait un calme relatif, l'officier Dark Angel estima plus diplomate d'ôter son heaume et de le poser à côté de lui, par égard pour les règles protocolaires.

Un vieil homme s'avança sur l'estrade. Grand, sec, il parlait d'une voix forte et empreinte d'autorité. Un Grand Inquisiteur, sans doute. En tout cas, il semblait avoir été désigné par ses pairs pour présider le Concile.


- Mes très chers frères, mes très chères soeurs. Soyez les bienvenus en ce Concile de la Très Sainte Inquisition. Au cours des prochains jours, nous allons apporter une réponse à toutes les questions oeucuméniques connues et déterminer la doctrine à faire appliquer d'un bout à l'autre de notre glorieux Imperium pour les années à venir. Je suis particulièrement heureux que les trois Ordres aient répondu à notre invitation, et j'adresse à chacun d'entre vous mes respects les plus profonds et les plus sincères. Mes amis, il est temps de commencer. Inquisiteur Weiss, je vous cède la parole.

Sur ces mots, l'homme s'esquiva, laissant la parole au premier orateur. Pertinax s'attendait à être présenté à l'assemblée, ou à être accueilli d'une façon ou d'une autre ; que ses hôtes se permissent de l'ignorer l'agaçait au plus haut point, mais il n'en laissa rien paraître.

Le Grand Maître ne tarda pas à découvrir qu'un Grand Concile est une manifestation où beaucoup parlent, mais où personne n'écoute. Les orateurs se succédaient à la tribune, abordant des sujets vains et abscons dans l'indifférence générale. Ainsi cet Inquisiteur qui se demandait si les croyances en vigueur sur le monde éloigné de Virago devaient être considérées comme hérétiques ; la population locale adorait un dieu unique, théoriquement compatible avec la doctrine générale de l'Ecclésiarchie au sujet des variantes locales du credo impérial, à ceci près que la société matriarcale de Virago ne pouvait concevoir qu'un dieu de sexe féminin. Toute la question était de savoir s'il était tolérable d'assimiler l'Empereur, père de l'Humanité, à la Sainte Mère du peuple de Virago. Dans la négative, les cent millions d'habitants de Virago devraient être éliminés au plus vite, ou à la rigueur recyclés en serviteurs mécanisés.

Pendant ce temps, les messes basses se poursuivaient dans les rangs du fond. Livres et documents étaient échangés au vu de tous, sans que quiconque ne trouvât à y redire. Pour Pertinax, un tel désordre était tout bonnement insupportable. Mais plus insupportable encore était le fait que nul ne semblait décidé à aborder la question de la disparition de Teufelgarten.

Soudain, Pertinax fut victime d'une violente migraine. Il faillit tout d'abord attribuer ce phénomène au vif agacement qui menaçait de le submerger. Mais il se ravisa. D'un air insouciant, il se saisit de son heaume, faisant mine de l'examiner ; puis il s'en coiffa de façon mécanique. La douleur cessa aussitôt.

Des psykers ! Quelque inconscient avait tenté de sonder son esprit. Ces maudits Inquisiteurs ne reculeraient-ils donc devant rien ? Faute de preuves tangibles, Pertinax devait se résoudre à faire comme si de rien n'était. Mais il porterait désormais son heaume protecteur en dépit du protocole.

Comme le craignait le Grand Maître, la journée fut interminable et se clôtura sans que lui ou Thargannis ne fût interrogé ou même pris en considération. Probablement la tactique d'usure déployée par l'Inquisition depuis l'arrivée de Pertinax sur Terra. En tout état de cause, l'officier en était réduit à espérer que son cas serait traité le lendemain.

La séance était à peine levée que les convives reprenaient leurs discussions passionnées en sous-main. Pertinax se leva en silence et entreprit de quitter le couvent au plus vite. C'est animé de sombres pensées qu'il parcourut à nouveau le pourtour du jardin.

Pensées qui furent interrompues brutalement. Six hommes venaient d'apparaître tout autour de lui, jusque là dissimulés par autant de colonnes de pierre. Au vu de leurs accoutrements débraillés, il devait s'agir de quelconques manants. Ou plutôt de quelconques brigands, car trois d'entre eux étaient armés de pistolets. Plus inquiétant, deux autres portaient des armes blanches parcourues d'éclairs et bourdonnant d'énergie. Quant au dernier, qui semblait jouer le rôle de chef, il brandissait une arme plus redoutable encore.


- Plus un geste, Marine. Tu sais ce que j'ai là, n'est-ce pas ? C'est un pistolet à plasma. Un seul mouvement, et je te pulvérise, avec ou sans armure.


A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:17

Pertinax ne jugea pas utile de répondre. Il s'interrogeait sur les motivations de ses agresseurs. Avait-il affaire à de simples voyous des bas-fonds ? Qu'une arme aussi rare et onéreuse qu'un pistolet à plasma se retrouve entre les mains d'un petit chef de bande avait quelque chose de dérangeant. Il s'agissait plus vraisemblablement de membres du crime organisé : même sur la Sainte Terra, la pègre régnait insidieusement sur les zones d'ombre de la société impériale, et force était de reconnaître qu'une assemblée d'Inquisiteurs constituait une cible tentante pour qui convoitait la fortune des Ordos. Il suffisait de dépouiller une seule victime pour s'octroyer plus de richesses et d'artefacts de valeur qu'en une vie entière de rapines.

D'un coup d'oeil, Pertinax jaugea la distance qui le séparait du bâtiment principal : celui-ci était bien trop éloigné pour que les troupes inquisitoriales puissent intervenir. De toute façon, les gardes étaient postés à l'intérieur, répartis sur les différents accès de l'amphithéâtre pour en interdire le passage à tout visiteur indésirable. Le jardin lui-même ne bénéficiait d'aucune surveillance, aussi les bandits n'avaient-ils eu aucun mal à préparer leur embuscade.


- Eh bien, tu as perdu ta langue, on dirait ? ricana le meneur. Ah, ces Astartes ! Toujours prêts à jouer les fiers à bras sur les champs de bataille, hein ? Mais une fois privés de votre escorte de larbins, vous ne valez pas tellement mieux que nous.

D'un mouvement du menton, il désigna le Grand Maître à ses acolytes.

- Sebka, Belisarius, occupez-vous de notre héros avant qu'il ne prenne ses jambes à son cou !

Les cinq hommes de main éclatèrent d'un rire aussi gras que malsain. Deux d'entre eux se détachèrent du cercle et avancèrent lentement vers Pertinax, brandissant leur arme énergétique pour parer à toute éventualité.

Le Dark Angel balaya la scène du regard. Quatre armes de poing étaient braquées sur lui, dont un pistolet à haut pouvoir pénétrant. Quel dommage que ses hôtes inquisitoriaux l'eussent privé de ses Sunfury ! Il aurait pu dégainer en un éclair et abattre toute la bande sans coup férir.

Le dénommé Belisarius était un géant musculeux à la mine patibulaire, et même si son visage ne témoignait pas d'une intelligence éclatante, l'homme était presque aussi imposant qu'un Astartes ; Sebka, lui, affichait une constitution plus ordinaire, mais son regard torve ne présageait rien de bon. Tous deux disposaient d'une matraque énergétique, susceptible de paralyser n'importe quel adversaire en quelques décharges. Prudents, ils arrivaient sur le Grand Maître par deux côtés opposés, afin de se protéger mutuellement tout en bénéficiant de la couverture de leurs camarades. De toute évidence, les deux brigands avaient pour consigne de neutraliser leur victime plutôt que de la tuer.

Ils n'en eurent pas le temps.

Pertinax fit un pas de côté, plaçant Belisarius entre lui et le chef de bande. Dans le même temps, sa cape se souleva tandis qu'il expédiait le tranchant de sa main dans la gorge de Sebka. Le gantelet blindé défonça la carotide du criminel et poursuivit sa course jusqu'à la colonne vertébrale, qui se rompit dans un craquement épouvantable. Le malheureux s'effondra sans un cri.

En réponse, les bandits ouvrirent le feu, saturant l'air de rayons meurtriers. Plusieurs tirs atteignirent le Grand Maître de plein fouet et ricochèrent sur son armure ; d'autres le manquèrent et vinrent frapper Belisarius qui se ruait au combat pour venger son compagnon. Criblé d'impacts, le molosse chancela mais tint bon ; avec une force terrifiante, il catapulta sa matraque sur la tête de Pertinax.

Son bras fut stoppé en pleine course, le poignet brisé net par la poigne de fer du Dark Angel. Pendant ce temps, pris de panique, le meneur hésitait à tirer. Belisarius se trouvait toujours dans sa ligne de mire, et sa silhouette imposante constituait un obstacle de bonne taille qui occultait presque entièrement le Space Marine ; mais si le Dark Angel n'était pas éliminé rapidement, il n'aurait de toute façon aucun mal à démembrer Belisarius. Résigné, le chef de bande leva son arme et lâcha un tir au jugé, comptant sur sa chance pour lui faire toucher la bonne cible.

La salve de plasma atteignit Belisarius entre les omoplates, vaporisant le torse du géant en une gerbe de sang écarlate. Profitant de ce répit, Pertinax put enfin dégainer l'Epée de Justice ; il bondit vers la colonne la plus proche, devant laquelle se tenait un autre homme de main.

Terrorisé, le criminel actionnait la détente comme un forcené, déchargeant son pistolet laser à bout portant dans une orgie de tirs saccadés. Sans résultat. Pertinax le décapita prestement d'un revers du bras ; au passage, la lame plusieurs fois millénaire vint mordre dans la colonne de pierre et y traça un profond sillon.

Alerté par le sifflement aigu caractéristique d'une arme à plasma en cours de rechargement, le Grand Maître conserva son élan et se glissa derrière le pilier. Des éclats de roche volèrent en tous sens tandis que des tirs de laser s'écrasaient sur la colonne et en détruisaient les élégants bas-reliefs. Presque aussitôt, une décharge de plasma bleuté faisait éclater la pierre.

Avec des réflexes foudroyants, Pertinax surgit du couvert, se précipitant droit sur un nouvel adversaire que d'un puissant coup d'estoc il empala pour le compte. Le Grand Maître fit pression sur l'Epée de Justice pour la dégager ; les servomoteurs de son armure et le champ disruptif de l'arme firent le reste. La lame se fraya un chemin vers le haut, découpant l'abdomen et la cage thoracique du criminel jusqu'à l'épaule, pour finalement jaillir à l'air libre en éclaboussant les environs.

Le corps mutilé n'avait pas encore entamé sa chute vers le sol que le Grand Maître lui avait déjà arraché son pistolet laser. Il abattit le dernier homme de main d'un tir en pleine tête avant de se retourner vers le chef de bande.

Celui-ci décida de tenter sa chance. Il pointa son pistolet à plasma pour exécuter un nouveau tir. Mais alors que son index se raidissait sur la détente, il ressentit une vive douleur qui lui fit lâcher prise : plus rapide, le Dark Angel l'avait touché au bras et ainsi désarmé. La fuite devenait un choix évident.


- Pauvre inconscient, grinça Pertinax.

D'un geste négligent, il fit décrire un arc à l'Epée de Justice, sectionnant les pieds du brigand et le jetant au sol en pleine course. L'homme s'étala de tout son long avec un gémissement pathétique.

Le Grand Maître jeta le pistolet laser devenu inutile et retourna le blessé du bout du pied ; le criminel bascula sur le dos. Comme l'homme faisait mine de se débattre, Pertinax cala son pied sur sa poitrine, le plaquant au sol pour de bon. Ceci fait, le Dark Angel entreprit d'examiner son prisonnier.

Un détail attira son attention : le col entrouvert du chef de bande laissait apparaître un tatouage, discret mais reconnaissable entre mille. L'Aquila de la Garde Impériale. Un vétéran des troupes impériales reconverti dans les activités criminelles ? Possible. Et pourtant, cette explication ne satisfaisait pas entièrement Pertinax.


- Qui t'envoie, crapule ?

- Je vais crever, protesta le malheureux. Je vais crever !

- Pas si tu es soigné rapidement, mentit Pertinax. Parle.

- Va te faire foutre, Marine !

Pertinax aurait volontiers prolongé l'interrogatoire, mais il se rendit compte que les troupes inquisitoriales arrivaient enfin à la rescousse, sans doute alertées par le bruit de la fusillade. Il n'aurait guère le temps d'obtenir des réponses ; ces maudits Inquisiteurs avanceraient un prétexte fallacieux pour le déposséder de sa proie et la faire disparaître dans l'ombre des Ordos. Agacé, le Grand Maître accrut la pression sur sa jambe et enfonça la poitrine du prisonnier, qui périt sur le coup.

Lorsque les premiers gardes arrivèrent, Pertinax achevait d'épousseter sa cape. L'étoffe blanche était percée en de nombreux endroits, seul témoignage de la violence des combats. Du moins, si l'on exceptait les corps éparpillés un peu partout.


- Que s'est-il passé, monseigneur ? s'enquit le sergent des troupes de choc.

- Une altercation. Ces hommes voulaient s'enrichir de façon malhonnête.

Sans un mot de plus, Pertinax fit volte-face et s'éloigna, laissant aux gardes le soin de nettoyer le carnage.

Non, ces hommes n'étaient pas de simples brigands. Ils étaient trop bien renseignés, trop bien armés. Comment savaient-ils que le jardin ne serait pas surveillé ? Pourquoi voulaient-ils à tout prix prendre leur victime vivante ? Et enfin, comment s'était-ils procurés un tel arsenal ?

La main de Pertinax effleura la matraque énergétique dissimulée sous sa cape. Il savait très bien qui avait monté cette embuscade. Une petite conversation s'imposait.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:18

Avec un soupir de contentement, l'adepte Mazen porta le verre à ses lèvres. Il mit tous ses sens en éveil tandis que le liquide ambré coulait lentement au fond de sa gorge. Un parfum douçâtre, une sensation de brûlure fugace, et ce fut tout : en fin de compte, cet alcool avait un goût plutôt désagréable. Mais il coûtait une véritable fortune, ce qui suffisait largement à Mazen.

L'adepte reporta son attention sur la baie vitrée. De forme ogivale, encadrée de rideaux de soie, elle se dressait sur une hauteur invraisemblable, comme pour écraser les visiteurs de son gigantisme. Au-delà du verre blindé, des formes indistinctes se dessinaient dans la nuit et le brouillard ; de temps à autre, un éclair venait déchirer l'obscurité, découpant la silhouette des tours gothiques en ombres chinoises.

Oui, seconder un Inquisiteur présentait nombre de risques. Certains y laissaient leur vie ; d'autres échouaient, jugés incapables d'accéder à la magistrature suprême. Mais pour prix de ce travail ingrat, au bout d'un chemin difficile et semé d'embûches, il y avait le pouvoir. Le pouvoir ! Bientôt, Mazen serait un Inquisiteur à part entière ; bientôt, il pourrait disposer à loisir de la vie de quiconque et décider sur un caprice de vitrifier la surface d'un monde.

Le jeune homme s'autorisa un rire satisfait et balaya la pièce du regard. A vrai dire, il n'avait même pas besoin d'attendre : en l'absence de son maître, il héritait de toutes ses prérogatives et bénéficiait de tous ses privilèges, au premier rang desquels figurait cette suite luxueuse, nichée dans les flancs de la forteresse inquisitoriale.


- Monseigneur, veuillez pardonner mon intrusion. Vous avez un visiteur.

Mazen se retourna vers la lourde porte et fusilla le serviteur du regard.

- A cette heure-ci ? Renvoie-le d'où il vient. Et ne t'avise plus de me déranger, misérable larve, ou je te ferai exécuter.

- Bien, monseigneur.

Penaud, le majordome mécanisé sortit à reculons et referma la porte derrière lui. Mazen resta un instant stupéfait par l'audace du serviteur : l'interrompre en plein travail malgré des ordres explicites ! Si le petit personnel commençait à prendre ses aises, comment Mazen pourrait-il se consacrer efficacement à sa tâche ? Le jeune homme décida qu'il ferait remplacer le majordome dès le lendemain.

Mazen reposa le verre vide avant de se diriger vers la bibliothèque d'un pas nonchalant. Des centaines d'ouvrages s'étalaient sur les rayonnages de bois précieux : la collection personnelle de l'Inquisiteur Jovena était un véritable trésor en soi. Certains grimoires constituaient le dernier témoignage d'une culture ou d'un courant de pensée condamné aux flammes ; d'autres traitaient des sciences occultes et des mystères insondables de l'Empyrean ; mais tous présentaient une facette de l'hérésie, ce monstre protéiforme que la Très Sainte Inquisition se devait de combattre pour l'Eternité.

L'adepte tendit la main pour caresser la reliure patinée d'un traité de linguistique eldar. Un ouvrage rarissime, qui ne subsistait qu'à quelques exemplaires dans tout l'Imperium depuis qu'un édit inquisitorial l'avait désigné pour l'autodafé.

Mazen sursauta lorsque la porte s'ouvrit à nouveau. Excédé, il laissa libre cours à sa colère.


- Sombre crétin, je croyais avoir été cl...

Le jeune homme s'interrompit, stupéfait. Devant lui se dressait la silhouette immense d'un Astartes en armure.

- Caius Pertinax ? Que faites-vous là ?

Le Dark Angel referma doucement la porte.

- J'ai quelques questions à vous poser, Mazen.

L'adepte écarquilla les yeux.

- Des questions ? Et qui croyez-vous être pour me poser des questions ?

En guise de réponse, Pertinax plongea la main sous sa cape et exhiba un objet métallique fuselé.

- Je suppose que vous reconnaissez ceci ?

Mazen fonça les sourcils.

- Une matraque énergétique ? Comment osez-vous pénétrer ici avec une telle arme ? Je vais immédiatement alerter la...

- Sachez qu'il est très imprudent d'attenter à la vie d'un officier de l'Adeptus Astartes. Mon Chapitre n'appréciera guère vos manigances et les prendra comme une provocation.

- Quelles manigances ? Je ne vois pas de quoi vous parlez.

D'un pas lourd et déterminé, Pertinax avança vers Mazen, tout en activant la matraque qui se mit à bourdonner de façon inquiétante.

- Cette arme est rare, Mazen, très rare. En dépit de ses qualités, elle n'est utilisée que par l'Adeptus Arbites, car ses facultés non létales ne présentent que peu d'intérêt pour les militaires. Bien sûr, lorsque des Arbites sont tués en mission, il peut arriver qu'une matraque tombe entre les mains de la pègre, auquel cas elle prend rapidement une grande valeur marchande.

Mazen restait de glace. Les bras croisés, il dévisageait le Dark Angel sans se démonter. Pertinax vint se planter devant l'adepte et lui présenta la matraque.

- Mais cette arme-ci ne présente aucun marquage, poursuivit l'officier. Ni numéro de série, ni unité d'appartenance. Elle n'est jamais passée entre les mains de l'Adeptus Arbites. De toute évidence, elle a été prélevée directement dans les arsenaux généraux de Terra.

- Mais enfin, que signifie tout ceci ? De quoi parlez-vous donc, par l'Empereur ?

- Ne blasphémez pas.

Pertinax apposa doucement l'extrémité de l'arme contre la jambe de Mazen. La décharge d'électricité émit un claquement sec, et le jeune homme s'effondra dans un cri.

- Vous êtes complètement fou, Pertinax ! Vous venez de signer votre arrêt de mort !

Haletant, Mazen tentait de se relever. Mais sa jambe gauche restait engourdie ; de petits éclairs résiduels continuaient à danser le long de sa cuisse. Imperturbable, Pertinax poursuivit son raisonnement.

- Qui pouvait avoir accès aux stocks d'armes de l'Arbites ? Qui pouvait connaître avec précision l'organisation du Concile ? Qui pouvait vouloir capturer un Astartes et doter une fausse bande de voyous d'un armement particulièrement adapté à cette tâche ? Un membre de l'Ordo Hereticus. Tout vous désigne, Mazen.

- Vous croyez que j'aurais pu organiser un attentat contre vous ? Pourquoi aurais-je fait cela ?

- C'est justement ce que je souhaite savoir.

Mazen esquissa un sourire sans joie.

- Pertinax, je vous répète que je ne suis au courant de rien.

Sans un mot, le Grand Maître appliqua la matraque sur la nuque de son interlocuteur, qui fut instantanément foudroyé. Mazen chuta de tout son long, les membres agités de soubresauts.

Pertinax le saisit d'une seule main et le traîna vers la baie vitrée. Le jeune homme était tout à fait paralysé désormais ; ses membres pendaient lamentablement pour lui donner l'apparence d'une poupée de chiffon. Seuls les muscles de son visage répondaient encore à sa volonté. En l'occurrence, ils exprimaient la plus vive angoisse.


- Bon sang, Pertinax, qu'avez-vous l'intention de faire ?

Le Dark Angel ne répondit pas. D'un geste du poignet, il fit pivoter le verrou et libéra les battants de la fenêtre, qui s'ouvrit à la volée. Un vent furieux se précipita dans la pièce, soulevant la cape mutilée de l'Astartes et s'engouffrant dans les interminables rideaux de soie. L'étoffe sembla prendre vie, voletant furieusement dans la suite comme une paire de serpents rougeoyants.

Tenant son fardeau à bout de bras, Pertinax s'aventura sur le balcon. Tombant à point nommé pour saluer son apparition derrière la rambarde d'airain, la foudre illumina le ciel, soulignant l'aspect sinistre de son heaume par un terrifiant jeu de clairs-obscurs.

L'officier souleva Mazen et le jeta sans ménagement sur la rambarde. Le haut du corps pendait mollement à l'extérieur, les bras ballants, seulement retenu par le poids des jambes. En-dessous du balcon, les murs de la forteresse s'enfonçaient dans les ténèbres nuageuses. La surface grouillante de Terra n'était pas discernable, mais elle était bien là, tapie à une profondeur insondable.


- Je vous écoute, Mazen.

- Vous vous apprêtez à commettre un meurtre ! Tuez-moi, et vous connaîtrez les pires tortures avant de périr dans les affres de l'agonie !

- Il ne s'agira pas d'un meurtre, mais d'un suicide. La matraque énergétique neutralise les terminaisons nerveuses en saturant les synapses, mais elle ne laisse aucune séquelle : vous aurez malencontreusement glissé sur le balcon.

- Pertinax, pour la dernière fois : je ne peux pas vous dire ce que je ne sais pas !

Le Grand Maître fit basculer Mazen dans le vide, le rattrapant in extremis par la cheville. Le jeune homme poussa un cri d'horreur. Il se balançait au-dessus du néant.

- Ma patience a des limites, Mazen.

- Attendez, attendez !... Je crois deviner ce qui vous est arrivé. Je suis peut-être en mesure de vous éclairer sur certains points.

- Parlez.

- Et qui me dit que vous me laisserez la vie sauve ? Je ne suis pas stupide : dès que vous aurez entendu ce que j'ai à dire, vous me tuerez.

- C'est une éventualité probable, en effet. Mais si vous observez le silence, je vous tuerai de façon certaine.

- Sauf que si vous me tuez maintenant, vous ne saurez rien.

- Certes, mais ce ne serait pas pas dramatique. Ces informations ne revêtent aucun caractère vital à mes yeux ; je désire simplement satisfaire ma curiosité. En revanche, vous tuer me procurerait un certain plaisir.

Mazen hésita un court instant.

- Vous disposez d'arguments convaincants, Pertinax.

Le jeune adepte reprit son souffle avant de continuer. Gagné par le vertige, il parlait les yeux fermés.

- Je suppose que l'Inquisition cherche à recueillir autant d'informations que possible avant votre procès.

- Mon procès ? Ne suis-je pas ici en qualité d'invité ?

- Officiellement, si. C'est bien pour cela que vous ne pouviez pas être interrogé comme un simple manant. Il fallait sauver les apparences et recourir à des moyens détournés. En général, l'Ordo utilise un ou plusieurs psykers pour sonder l'esprit de l'accusé ; lorsque cela ne suffit pas, il est possible d'organiser un enlèvement pour soumettre l'accusé à la Question.

- C'est absurde. Que les informations ainsi recueillies soient utilisées au cours du procès, et l'accusé saura immédiatement que son enlèvement était le fait des Ordos !

- Bien sûr, mais il ne pourra pas le prouver. Tant qu'un fait n'est pas prouvé, il n'est pas recevable devant l'Inquisition.

Pertinax rumina cet argument. Telle était l'hypocrisie dans laquelle se vautraient les laquais de l'Inquisition : les actes les plus inqualifiables pouvaient être commis au vu et au su de tous, sans que quiconque ne trouvât à y redire ; tant que les apparences étaient sauves, chacun acceptait implicitement de souscrire à ce jeu de dupes.

- Ainsi, l'Inquisition souhaite rendre les Dark Angels responsables de la disparition de Teufelgarten ?

- Bien sûr ! Votre Chapitre traîne une réputation sulfureuse, il serait dommage de laisser passer une telle occasion de le mettre en porte-à-faux.

Le Grand Maître ne répondit pas. Un silence pesant s'établit entre les deux hommes, seulement interrompu par de vives bourrasques ; suspendu entre ciel et terre, Mazen attendait son destin avec résignation.

Pertinax ramena le jeune homme sur le balcon et le traîna à l'intérieur. Puis il désactiva la matraque et la jeta à travers la fenêtre ; l'arme disparut dans le néant.


- N'espérez pas un témoignage de gratitude larmoyante de ma part, Pertinax. Vos actes seront rapportés en haut lieu. Vous paierez le prix fort pour ce que vous venez de faire.

Saisissant Mazen par la gorge, Pertinax le souleva comme un jouet.

- Tant qu'un fait n'est pas prouvé, il n'est pas recevable devant l'Inquisition. Ce sera votre parole contre la mienne.

- La parole d'un simple guerrier contre celle d'un Inquisiteur ? L'issue ne fait aucun doute.

Pertinax ramena le visage de l'adepte contre le sien. Les lentilles de son heaume brillaient d'une lueur rouge sang dans la pénombre.

- Vous n'êtes pas un Inquisiteur, Mazen. Pour l'heure, vous n'êtes rien ; aux yeux de vos maîtres, vous n'avez pas plus de valeur que le majordome qui garde votre porte.

Le Dark Angel détendit le bras, projetant le jeune homme dans les airs. Le corps inerte retomba sur le lit à baldaquins, où il rebondit plusieurs fois avant de s'immobiliser dans une pose grotesque.

Pertinax se dirigea vers la porte. Il aurait déjà fort à faire pour justifier la disparition de Teufelgarten ; éliminer ce jeune prétentieux ne ferait qu'offrir un argument de plus à ses détracteurs. Pour l'heure, il devait regagner ses appartements. La nuit serait courte, et la seconde journée du Concile, décisive.



A suivre...

Auteur: Caius Pertinax
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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:18

- Mes très chers frères, mes très chers soeurs, soyez les bienvenus en ce second jour du Concile de la Très Sainte Inquisition.

Comme si ces mots avaient marqué la fin des réjouissances préliminaires, les derniers Inquisiteurs encore debout daignèrent enfin gagner leurs sièges attitrés et s'asseoir. Pour autant, ce signal convenu ne parvint pas à les discipliner tout à fait, et la plupart des membres de l'assistance poursuivirent leur conversation sans même baisser la voix.

Imperturbable, le maître de cérémonie continuait à parler comme si de rien n'était. Magnifiée par des vocaliseurs argentés, sa voix suave se répercutait dans l'amphithéâtre avec une douceur tonitruante qui ne parvenait qu'à grand-peine à dominer le brouhaha ambiant.


- Mes amis, nous devons hélas déplorer la perte de notre révéré confrère, l'Inquisiteur Teufelgarten, porté disparu tandis qu'il menait une investigation pour le compte de l'Ordo Hereticus. Nous le pleurerons longtemps et amèrement, mais dans notre peine infinie, nous trouverons néanmoins un réconfort dans la certitude que sa loyauté et sa détermination lui auront valu une place amplement méritée à la droite du Saint Empereur de l'Humanité.

Un silence respectueux s'était abattu sur le grand amphithéâtre. Si les Inquisiteurs se souciaient comme d'une guigne du devenir d'un monde reculé ou de l'agonie d'une civilisation lointaine, la mort d'un des leurs les touchait bien plus durement. Que leur propre sécurité puisse être menacée leur apparaissait comme un véritable sacrilège.

L'espace d'un instant, le visage inflexible de l'orateur fut éclairé par un léger sourire tandis qu'il savourait ce petit triomphe : capter l'attention d'un auditoire aussi difficile n'était pas une mince affaire et pouvait s'apprécier à sa juste valeur. Mais le devoir était appelé à prendre le dessus, aussi le maître de cérémonie poursuivit-il son discours sans plus attendre.


- L'Inquisiteur Teufelgarten était en tournée d'inspection sur le Roc, la forteresse spatiale mobile du Chapitre des Dark Angels. Nous avons reçu un message signalant son arrivée sur place, puis plus rien.

Tous les regards convergèrent vers l'Astartes en armure de sinople et d'or qui se tenait au premier rang.

- Par un hasard extraordinaire et providentiel, un officier Dark Angel de haut rang est actuellement en pèlerinage sur Terra. Il a accepté notre invitation amicale et pourra peut-être nous apporter quelques éclaircissements à ce sujet. Grand Maître Caius Pertinax, la parole est à vous.

Pertinax se leva et salua l'orateur d'un léger hochement de tête. Tirant parti des leçons de la veille, le Grand Maître avait gardé son heaume ; l'assistance pourrait le prendre comme un affront ou un déni de reconnaissance, mais Pertinax n'en avait cure.

- L'Inquisiteur Teufelgarten et sa suite se sont en effet présentés au Roc pour y procéder à une inspection des plus ordinaires. Bien entendu, nous avons accueilli ce digne représentant de la Très Sainte Inquisition avec les égards et le respect dus à un personnage de son rang, et toutes nos portes se sont ouvertes à sa demande. Au cours de sa visite, le Seigneur Teufelgarten a pu constater que le Chapitre des Dark Angels disposait de forces militaires considérables, et notamment d'une flotte de guerre particulièrement puissante qui lui confère une totale liberté de mouvement. Il a également pu vérifier que le Roc était non seulement mobile, mais aussi inexpugnable.

Pertinax marqua une pause pour s'assurer que l'Inquisition avait bien perçu la menace voilée qui exsudait de ses propos. Non seulement il rappelait à l'Inquisition que le Chapitre jouait un rôle de premier plan dans la défense d'un Imperium assiégé de toutes parts, mais de plus il laissait entendre que toute velléité de purge se heurterait à une vive résistance armée.

Les murmures reprirent dans l'assistance, ponctués par quelques grognements désapprobateurs. Sans laisser rien paraître de sa satisfaction, Pertinax reprit.


- Au terme des trois jours prévus pour son inspection, l'Inquisiteur Teufelgarten a souhaité prendre congé à bord de son vaisseau personnel. Or, les hangars et les arsenaux du Roc sont enfouis au plus profond d'une cavité creusée dans la roche afin de les protéger contre tout bombardement ; entrée comme sortie nécessitent une navigation extrêmement précise au travers des tunnels d'accès. Il s'agit là d'un exercice des plus périlleux, même pour les pilotes hautement qualifiés de la Très Sainte Inquisition. Comme l'appareil du Seigneur Teufelgarten avait déjà frôlé la collision lors de son arrivée au Roc, nous avons proposé de le faire accompagner par un serviteur de navigation aguerri à cette manoeuvre difficile. Hélas, il a refusé. Et à notre grand chagrin, le vaisseau inquisitorial s'est écrasé contre une paroi.

Les murmures s'amplifièrent, cependant que les grognements se muaient en cris de protestation. Certains Inquisiteurs n'accordaient aucune foi à la version de Pertinax et le faisaient bruyamment savoir. Le maître de cérémonie dut hausser la voix pour dominer la révolte naissante de l'amphithéâtre survolté.

- Ainsi donc, notre confrère et ami a péri dans un tragique accident. Voilà qui répond à nos interrogations et clôt le débat.

Mais tous ne l'entendaient pas de cette oreille. Un Inquisiteur d'âge mur, entièrement vêtu de pourpre et de gris, se leva soudainement pour s'arroger la parole.

- Messire Pertinax, vous nous dites que Teufelgarten menait une simple inspection. Je crois pour ma part qu'il se livrait à une enquête bien plus spécifique. Et que sa disparition, loin d'être accidentelle, l'a empêché de nous livrer des vérités fort compromettantes pour votre Chapitre.

Pertinax répondit sans se retourner.

- Si j'en crois le message par lequel l'Inquisiteur Teufelgarten nous a avisés de son arrivée, sa venue était bel et bien motivée par une simple inspection. Voulez-vous dire qu'il nous aurait sciemment caché ses véritables intentions ? J'ai peine à croire qu'un homme aussi intègre et aussi droit qu'un Inquisiteur puisse recourir à la tromperie.

- Personne ne pratique mieux la tromperie que vous autres Dark Angels. Votre histoire est jalonnée de zones d'ombres, et vous couvrez chacune de vos actions d'une chape de silence pour mieux dissimuler vos agissements.

- La discrétion nous est imposée par des nécessités militaires. Il serait malséant d'exposer la stratégie de l'Empereur aux ennemis de l'Humanité.

Un second Inquisiteur se leva. Très âgé, tout couturé de cicatrices, il faisait figure de vétéran et avait de toute évidence une solide expérience des batailles.

- Les autres forces armées de l'Imperium seraient-elles à classer parmi les ennemis de l'Humanité ? A de nombreuses occasions, vos troupes se sont détournées de l'objectif commun assigné par le Haut Commandement Impérial pour suivre des objectifs propres et pour le moins mystérieux. Sur Kossell, plusieurs milliers de braves ont péri lors de la contre-offensive des rebelles, parce qu'ils avaient été abandonnés par les Dark Angels supposés les appuyer.

- Notre Chapitre reçoit ses ordres de l'Empereur et de Lui seul, aussi nos corps expéditionnaires ne collaborent-ils avec les autres unités que dans la mesure où cela est compatible avec leur propre mission. Cependant, lorsque les circonstances l'exigent, nous pouvons placer des troupes sous la juridiction directe du Haut Commandement Impérial. Il en est ainsi de la IIIe Unité d'Assaut Planétaire que j'ai l'honneur et le privilège de commander.

Des hochements de tête épars marquèrent l'approbation de quelques spectateurs. Azrael avait raison : les campagnes de Pertinax et de la IIIe leur avaient valu une bonne réputation auprès des instances militaires de Terra. Mais il en fallait plus pour désarçonner le vieil Inquisiteur, qui répondit du tac au tac.

- Vous êtes prompt à vanter les mérites de votre IIIe Unité d'Assaut Planétaire, mais vous n'êtes pas exempt de critiques, messire Pertinax. Ainsi, lors de la conquête de T'au Phal'ab, vous n'avez pas hésité à lancer une offensive contre vos alliés et à détruire la totalité d'une compagnie du XXIe Steel Dragons, une unité d'élite de la Garde Impériale.

- Le régiment auquel vous faites allusion avait fraternisé avec les infâmes Tau et menaçait de mettre ses blindés lourds au service de ses nouveaux maîtres xenos. Comme le Haut Commandement hésitait à ordonner l'ouverture du feu, j'ai pris l'initiative d'éliminer ces traîtres avant que leur exemple n'incite d'autres soldats impériaux à prendre fait et cause pour l'ennemi. T'au Ph'alab est tombée quelques semaines plus tard.

- Le problème tient moins du fond que de la forme : vous avez mené cette attaque de votre propre chef, sans même en aviser le Haut Commandement Impérial. Et il ne s'agit pas d'un phénomène isolé : les Dark Angels ont élevé cette détestable pratique au rang de coutume. Que vous deviez répondre à vos propres ordres est une chose ; que vous entreteniez un tel secret autour de vos actions en est une autre.

- Nous n'avons aucun secret pour la Très Sainte Inquisition. Nos archivistes consignent chacune de nos campagnes dans leurs registres, et tout Inquisiteur dûment mandaté pourra librement consulter ces documents sur le Roc.

- A moins qu'il ne disparaisse en chemin, bien sûr.

- Je suis persuadé que la Très Sainte Inquisition sera dorénavant très vigilante quant au choix de ses navigateurs. Tout risque d'accident sera ainsi écarté.

Comme son confrère ne répondait pas, le premier contradicteur de Pertinax reprit la parole.

- Et moi, je persiste à dire que les Dark Angels nous cachent bien des choses. Votre manie du secret vous pousse à commettre les actes les plus criminels. Pourquoi ? Quels sombres activités dissimulez-vous à votre Empereur ?

Cette fois-ci, Pertinax se retourna lentement et planta ses yeux dans ceux de l'Inquisiteur. Il haussa le ton, écrasant l'amphithéâtre sous le fracas de sa voix métallique.

- Mon Chapitre sert l'Empereur avec dévouement depuis plus de cent siècles. Comment osez-vous proférer de telles accusations sans preuves ?

L'homme découvrit les dents en un large sourire carnassier.

- Mais j'ai des preuves, messire Pertinax. Maître de la Foi Thargannis, du Chapitre des Black Templars, je vous cède la parole.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:19

Le chapelain avait observé jusque là le silence le plus absolu. Tout comme Pertinax, il occupait le premier rang du vaste amphithéâtre, rang déserté par les Inquisiteurs qui préféraient pour la plupart se masser au fond de la salle ; mais mus par une sorte d'accord tacite, les deux Astartes se tenaient à bonne distance l'un de l'autre.

A peine son nom fut-il mentionné que Thargannis se redressa brutalement de toute sa hauteur. Un frisson parcourut l'assistance tandis que les murmures se taisaient enfin. Le spectacle en valait la peine : deux imposantes silhouettes cuirassées se dévisageaient de part et d'autre de l'amphithéâtre en une étrange symétrie. Une symétrie bien imparfaite, cependant, car le reflet de Pertinax arborait une armure de jais frappée de la croix des Templiers.

L'Inquisiteur qui tenait lieu de maître de cérémonie crut voir là une occasion de reprendre le contrôle du Concile, lequel lui avait échappé dès les premiers arguments échangés par Pertinax et ses détracteurs.


- Nous avons en effet parmi nous un autre pèlerin de renom en la personne du...

- J'ai des révélations à faire, le coupa Thargannis.

Le chapelain parlait de la voix de stentor commune à tous les Astartes. Mais à cela s'ajoutait le heaume à tête de mort, propre à ceux qui répandent en Son nom la sainte parole de l'Empereur sur les champs de bataille. Alors que Thargannis se tournait vers l'assemblée, son masque parut prendre vie, frappant de stupeur tous ceux qu'il balayait de son regard impitoyable. Réduit à l'impuissance, le maître de cérémonie se tut.


- Le Chapitre des Black Templars n'aime pas faire étalage de ses exploits, et moins encore de ses déboires. Pourtant, je sais que plusieurs d'entre vous ont eu vent de la disparition du croiseur d'attaque Ophidium Gulf.

Thargannis observa une courte pause, le temps de se retourner vers Pertinax.


- Le temps est venu de vous éclairer sur les circonstances de cette disparition.

Pertinax serra les dents. Ainsi donc, ce misérable avait choisi d'exposer leur querelle sur la place publique !

- L'Ophidium Gulf et son contingent de troupes menaient une croisade au nom de l'Empereur, béni soit Son nom. Après de longs mois de combats acharnés, le vaisseau avait pris le chemin du retour ; sa route devait le mener dans le quadrant Sud de la Galaxie, où il rencontra par hasard une flotte du Chapitre des Dark Angels en pleine opération de débarquement. N'écoutant que son courage, le Sénéchal Raimer ignora les pertes précédemment subies par son effectif et offrit généreusement son assistance à ses frères d'armes. C'est ainsi que l'équivalent d'une pleine compagnie de Black Templars fut déployé auprès des Dark Angels. Notre objectif commun était de mettre un terme à un mouvement de révolte de la population, détournée de la Vraie Foi par les mensonges obscènes d'un agent manipulateur ennemi qui se faisait appeler la Voix de l'Empereur.

Thargannis maintenait un rythme soutenu, tant pour susciter l'intérêt de l'auditoire que pour s'affranchir de toute interruption. En l'occurence, l'amphithéâtre était suspendu à ses lèvres.

- A ce stade de mon récit, poursuivit-il, je dois préciser que nos frères Dark Angels faisaient montre d'une certaine réticence. Alors que notre présence aurait dû les réjouir, elle semblait les gêner. Et lorsque nos unités mirent la main sur le chef de l'insurrection, cette méfiance se transforma en hostilité. Bien sûr, Raimer estimait qu'en vertu des lois de la guerre, le prisonnier serait interrogé et détenu par les Black Templars puisque ceux-ci avaient procédé à sa capture. Pourtant, les Dark Angels réclamèrent que le prisonnier leur fût remis, et allèrent jusqu'à pointer leur artillerie lourde sur l'Ophidium Gulf pour appuyer leur demande. La mort dans l'âme, le Sénéchal choisit d'obtempérer pour éviter une confrontation fratricide. La Voix de l'Empereur fut livrée aux Dark Angels, et l'Ophidium Gulf prit la résolution de quitter les lieux avant qu'un nouvel incident ne vînt émailler cette étrange collaboration.

Avec un indéniable sens théâtral, le chapelain choisit de marquer un temps d'arrêt, histoire d'accroître l'intensité dramatique. Quitte à frapper, autant que son coup portât à plein.

- Hélas, le croiseur ne parvint jamais à bon port. Il fut officiellement porté disparu, mais je précise par avance à mon frère Dark Angel ici présent que je n'accepterai aucune remise en cause de la compétence de nos astronavigateurs. Qu'il justifie la disparition d'un Inquisiteur par un stupide accident si cela lui chante ; mais une telle méprise est exclue de la part d'un navire templier. Je laisse à cette assemblée le soin de tirer ses propres conclusions quant au sort de l'Ophidium Gulf ; cependant, et pour éclairer votre réflexion, je tiens à livrer une dernière péripétie à votre légendaire sagacité. Si Raimer n'eut pas eu le temps d'interroger la Voix de l'Empereur, il put toutefois remarquer certains détails troublants et les consigner dans son rapport astropathique. Par une troublante coïncidence, l'agitateur portait une armure énergétique d'un modèle certes ancien, mais de construction indéniablement impériale. Qui plus est, cette armure était frappée du blason des Dark Angels.

Une vive agitation se répandit dans l'amphithéâtre comme une traînée de poudre. Pertinax devait réagir au plus vite pour désamorcer ce qui menaçait de dégénérer en une crise majeure pour le Chapitre. Il fut tenté de nier en bloc les affirmations du Black Templar ; mais il aurait été stupide de croire que Thargannis serait venu sur Terra les mains vides. Le chapelain avait sans doute amené avec lui des enregistrements de communications astropathiques pour étayer ses dires et fournir aux Ordos des preuves indiscutables. Dans ces conditions, nier serait la plus catastrophique des stratégies, car Pertinax passerait immanquablement pour un affabulateur. Les faits étaient indiscutables ; par contre, il était possible de jouer sur leur interprétation.

- Je n'ai pas participé personnellement à cette opération, mais je puis fournir à mon frère chapelain des éléments de réponse susceptibles de le soulager. La Voix de l'Empereur est en effet un redoutable émissaire des Puissances de la Ruine, une menace considérable pour notre glorieux Imperium. Ses méfaits nous ont été reportés pour la première fois lors de la XIIIe Croisade Noire d'Abaddon le Fléau : à cette époque, il avait élu domicile sur Agripinna et encourageait la population à se soulever contre la juste domination de l'Empereur. Pour mieux tromper une populace crédule et servile, cet être méprisable entretenait la confusion, se faisant passer pour un serviteur de l'Imperium et prétendant que les troupes loyalistes étaient en réalité constituées de traîtres. Comble du sacrilège, la Voix de l'Empereur s'était procurée une de nos armures ; elle l'utilisait pour appuyer sa version et accroître sa crédibilité aux yeux de la foule. Nous ne pouvions tolérer un tel affront, et plusieurs compagnies furent affectées à la destruction de ses forces, puis à sa capture. Ma propre unité fut déployée sur Agripinna à cette fin, même si les évènements m'ont finalement amené à combattre une incursion nécrontyr.

Thargannis ne répondait pas, mais Pertinax n'était pas dupe : il savait que le chapelain ne se laisserait pas convaincre. A vrai dire, peu lui importait. Il devait surtout dissiper les doutes de l'Inquisition pour éviter que le Chapitre tout entier ne fût mis en péril.

- Hélas, continua le Grand Maître, la Voix de l'Empereur parvint à s'échapper. Du moins, pour un temps, car nous retrouvâmes sa trace peu après. Une flottille entama le blocus de sa planète d'accueil, et il ne fait aucun doute que nous serions de toute façon parvenus à la mettre hors d'état de nuire en quelques jours de combat. En fait, et en dépit de leur bonne volonté manifeste, nos frères Black Templars vinrent bouleverser des opérations de débarquement soigneusement minutées, ce qui compliqua sérieusement la tâche du Maître de Flotte. Pour ne rien arranger, les Black Templars voulaient interroger eux-mêmes le prisonnier, alors que notre connaissance appronfondie de ce criminel et de ses méthodes nous auraient permis de lui soutirer des informations utiles plutôt que de simples aveux. Il se raconte chez nous un vieux conte, que beaucoup d'enfants connaissent de par l'Imperium sous une forme simplifiée : le Lion et le Loup. Cette histoire relate comment le Lion et le Loup voulurent unir leurs forces pour terrasser un Dragon. Le Lion voulait user de la ruse pour surprendre l'ennemi et le terrasser sans coup férir ; le Loup préféra se jeter sans attendre à la gorge du Dragon pour s'arroger tout le mérite de la victoire. Bien sûr, un tel ennemi était bien trop redoutable pour le Loup seul, et le Dragon prit rapidement le dessus. Le Lion était furieux de voir son plan réduit à néant, mais il parvint néanmoins à sauver le Loup d'une mort certaine et à venir à bout du Dragon.

Pertinax marqua une pause. Perplexe, l'auditoire attendait la fin de son plaidoyer.

- Voilà qui explique la réaction agacée de notre Maître de Flotte : l'orgueil déplacé des Black Templars aurait pu avoir de lourdes conséquences sur la sécurité de l'Imperium. Mais je puis affirmer avec certitude que jamais une flottille de mon Chapitre n'aurait ouvert le feu sur un vaisseau templier. J'ignore ce qu'il est advenu de l'Ophidium Gulf, mais il serait absurde de soupçonner les Dark Angels d'être impliqués dans cette regrettable disparition.

- Le soupçon résulte toujours des enseignements du passé, répliqua Thargannis. En maintes occasions, j'ai pu constater l'obsession des Dark Angels à vouloir faire cavalier seul et à oeuvrer dans l'ombre. Par ailleurs, les fréquentes escarmouches ayant opposé les Dark Angels aux Space Wolves au cours des derniers siècles sont en totale contradiction avec les dires de mon frère Marine quant à l'incapacité supposée de sa flotte à ouvrir le feu sur des alliés.

- Les Space Wolves constituent un cas à part. Leur jalousie à notre égard, leur nature belliqueuse et dix millénaires de rivalité les amènent parfois à lancer des attaques irréfléchies contre nos unités. Fort heureusement, ces combats sont toujours de faible intensité et de courte durée, car même les fils de Russ finissent généralement par entendre raison. Hélas, notre statut de Première Légion nous vaut bien des ennemis au sein de l'Imperium ; mais jamais nous ne nous en prendrions à de loyaux serviteurs de l'Empereur. De telles luttes intestines seraient une plaie pour l'Imperium, et seuls les ennemis de l'Humanité en tireraient parti.

- Les Dark Angels retirent, semble-t-il, une grande fierté de la primauté de leur Légion. Mon frère Pertinax a beau jeu de pointer du doigt l'orgueil des Black Templars ; mais la fierté de son propre Chapitre va au-delà de l'imaginable. Les Dark Angels croient pouvoir s'affranchir de toutes les règles et de toutes les lois. Leur organisation, par exemple, constitue une violation flagrante des édits de Roboute Guilliman.

- Si nous ne suivons pas toujours la lettre du Codex Astartes, nous respectons en revanche son esprit. On ne peut pas en dire autant des Black Templars, qui maintiennent un effectif très supérieur au millier d'hommes préconisé par Guilliman pour limiter les conséquences d'une éventuelle hérésie. A ce propos, je suis persuadé que mon frère chapelain se fera un plaisir d'informer cette docte assemblée sur le nombre exact de templiers déployés à l'heure actuelle dans la Galaxie.

Des rires fusèrent dans l'auditoire. Pertinax se demanda un instant qui de lui-même ou de Thargannis était l'objet de ces railleries. Il comprit bien vite qu'ils l'étaient tous deux : des officiers de haut rang de l'Adeptus Astartes réglant leurs comptes en public, comment imaginer un meilleur amusement pour ces maudits Inquisiteurs ? Et quel piètre spectacle pour l'Empereur que de voir ses fils se déchirer de la sorte ! Le Dark Angel fut frappé de honte à cette idée. De toute évidence, Thargannis était arrivé à la même conclusion, car il ne répondit pas.

Bondissant sur l'occasion, le maître de cérémonie fit une nouvelle tentative.


- Maître de la Foi Thargannis, soyez loué pour ce précieux témoignage. Et maintenant...

- Je dois apporter une importante correction, reprit le chapelain. Mon frère Dark Angel a parlé du Roc comme d'une forteresse inexpugnable. Aucune forteresse n'est inexpugnable pour les Black Templars : nous sommes les héritiers des Imperial Fists et de Rogal Dorn, et à ce titre aucune muraille, aucune défense ne sauraient se dresser en travers de notre route.

Le maître de cérémonie parut interloqué.

- Voulez-vous dire par là que vous envisagez de lancer une action offensive contre le Roc ?

- Je n'ai rien dit de tel. Il ne nous appartient pas de prendre une telle initiative. Les Black Templars sont les serviteurs de l'Empereur et n'obéissent qu'à Sa volonté. Cependant, si l'ordre nous en était donné, nous attaquerions le Roc avec notre zèle coutumier. L'Inquisition craint peut-être les conséquences d'un conflit ouvert avec les Dark Angels, ce qui n'est guère surprenant au vu de la nature timorée de ses membres qui privilégient toujours aux actes le complot et la manoeuvre politique ; qu'elle sache que les Black Templars, eux, ne reculeront pas devant le devoir.

Tandis que l'assemblée accusait le coup, Thargannis s'assit : atterrés, les Inquisiteurs restaient cois. Au terme d'un long silence, une jeune femme rousse au visage austère et à la tenue stricte se leva au beau milieu de l'amphithéâtre.

- Mes très chèrs frères, mes très chères soeurs, j'en ai assez entendu. Je propose de déclarer le Chapitre des Dark Angels Excommunicate Traitoris.

A ces mots, l'auditoire fut frappé de stupeur. Quelques applaudissements se firent entendre, mais la plupart des Inquisiteurs s'entreregardèrent en silence. Les murmures reprirent, plus vivaces que jamais. De tous côtés, les dignitaires devisaient furieusement pour rallier leurs voisins à leur opinion.


- Eh bien, reprit la jeune Inquisitrice, qu'attendons-nous ? Mettons ma proposition aux voix.

Le maître de cérémonie paraissait embarrassé. Il se leva lentement, indécis, pour demander le vote à main levée. Alors qu'il allait ouvrir la bouche, un autre Inquisiteur, plutôt âgé celui-là, se dressa dans la foule et prit la parole.

- Avant de procéder à ce vote, je demande une suspension de séance.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:20

Le maître de cérémonie accueillit la proposition avec un soulagement mal dissimulé.

- A la demande de l'Inquisiteur Mantis, la séance est suspendue. Nous reprendrons après une courte pause.

Ici ou là, quelques protestations lui répondirent ; mais pour la plupart, les spectateurs se levèrent sans demander leur reste. La foule bruyante des Inquisiteurs se retira dans le plus grand désordre, chacun reprenant le fil de ses manigances avec ses confrères.

- C'est un outrage ! lança la jeune femme rousse avant de gagner la sortie à son tour.

Pertinax la suivit du regard tandis qu'elle se frayait un passage entre les rangées de sièges. Sur le pas de la porte, un petit groupe l'attendait ; le Grand Maître ne fut pas surpris d'y reconnaître tous ses détracteurs. Y compris Thargannis.

Tandis que la Très Sainte Inquisition se dispersait dans les jardins avoisinants, Pertinax demeurait immobile, silhouette sombre et silencieuse dans l'amphithéâtre désert. Le sort du Chapitre pouvait-il être scellé de la sorte, par un simple vote ? Dix mille ans de guerres et de conquêtes au service de l'Empereur allaient-ils être balayés du revers de la main par une poignée de gratte-papiers inconscients ?

Si les Dark Angels devaient être excommuniés, le premier geste de l'Ordo Hereticus serait de mettre Pertinax aux arrêts. Le Grand Maître étudia mentalement cette éventualité : il n'aurait aucun mal à se débarrasser des gardes. En revanche, le chapelain Black Templar constituerait une menace à ne pas prendre à la légère. Mais à quoi bon se battre ? Pertinax ne pourrait jamais quitter le sol de Terra. Tôt ou tard, il serait écrasé sous le nombre, et sa tentative de fuite serait présentée par l'Inquisition comme une preuve supplémentaire de la prétendue félonie des Dark Angels. Non, il ne fuirait pas devant l'Inquisition. Il s'inclinerait avec dignité devant les ordres de Terra pour affirmer jusqu'au bout sa loyauté envers l'Empereur. L'Ordo Hereticus le soumettrait probablement à la Question ; mais il ne trahirait pas le Chapitre et proclamerait l'innocence des siens jusqu'à son dernier souffle.

Pertinax fut tiré de sa rêverie par un bruit de pas. Se retournant, il vit un vieil homme descendre les escaliers et clopiner dans sa direction. L'officier reconnut aussitôt l'Inquisiteur qui avait demandé l'interruption de séance.


- Messire Pertinax, je dois vous parler.

- Qui êtes-vous ?

- Inquisiteur Mantis, pour vous servir. Mais nous avons peu de temps, aussi vais-je abréger les formules de politesse. Pertinax, vous êtes en bien fâcheuse posture.

- Je suppose que vous faites allusion à ce prétendu vote.

- Ce prétendu vote pourrait bien sonner le glas de votre Chapitre.

La voix du vieillard était douce, mais son regard terne et ses épaules tombantes trahissaient une profonde mélancolie. Pertinax le fixa droit dans les yeux.

- Tout était arrangé depuis le début, n'est-ce pas ? Pourquoi cette mascarade ?

Mantis secoua la tête d'un air triste.

- Vous vous trompez : nos votes ne sont pas truqués. Voyez-vous, Pertinax, l'Inquisition n'est pas une et indivisible. Il s'agit avant tout d'un groupe disparate, qui fourmille de courants contraires et d'opinions divergentes. Les rivalités ne sont pas rares entre nous, et certaines factions peuvent aller jusqu'à se déchirer dans des conflits sans fin. Tout comme les Chapitres de l'Astartes, à ce que je vois.

Pertinax allait s'élever contre une telle comparaison, mais il se ravisa. La présence de Thargannis dans les rangs de l'accusation était la plus explicite des preuves.

- Avec le témoignage de ce Black Templar, poursuivit l'Inquisiteur, vos ennemis ont marqué un point décisif. Jusqu'à présent, aucun Astartes n'avait jamais accepté de témoigner contre les Dark Angels. A part les Space Wolves, bien sûr ; mais leur...

- Où voulez-vous en venir ? le coupa Pertinax.

- Vous ne vous en sortirez pas seul. Vous aurez besoin de mon aide.

- Les Dark Angels n'ont besoin de rien, ni de personne. L'Inquisition elle-même ne peut dissoudre un Chapitre de la Première Fondation sur un caprice. Les autres Chapitres se révolteraient contre une telle décision ; à l'heure où notre Imperium est menacé de toutes parts, ce serait pure folie.

- J'en suis persuadé. Hélas, tous ne pensent pas comme moi : les partisans de Teufelgarten n'ont jamais été aussi nombreux, et avec Ysabel de Fennakad à leur tête, je crains que...

- Teufelgarten est mort.

- Cessez donc de m'interrompre, Pertinax, et écoutez-moi, voulez-vous ? Teufelgarten était le chef de file de sa propre faction, un groupuscule qui militait depuis des décennies pour faire excommunier les Dark Angels. Pendant longtemps, les efforts de Teufelgarten sont restés lettre morte, car les Chapitres de l'Adeptus Astartes étaient jugés trop utiles pour être sacrifiés à la moindre suspicion d'hérésie. Mais l'excommunion des Relictors a galvanisé Teufelgarten et lui a valu des soutiens, notamment de la part de jeunes enthousiastes qui croyaient pouvoir se faire un nom rapidement. Au sein de l'Inquisition, on retire plus de gloire dans l'accusation que dans la défense : y a-t-il plus exaltant que de contribuer à la condamnation d'un puissant Chapitre ?

Haletant, le vieil homme dut marquer une pause pour reprendre son souffle. Puis il poursuivit.

- L'inspection de Teufelgarten sur le Roc visait à rassembler des preuves avant de lancer le pogrom. Mais ironiquement, c'est finalement sa mort qui a servi de prétexte à ses partisans. Reste à savoir comment ils ont convaincu ce Thargannis de témoigner.

- Peu importe, rétorqua Pertinax. Ce groupuscule ne représente qu'une minorité. Si le vote n'est pas truqué, comme vous l'affirmez, ils ne pourront emporter la décision à eux seuls.

- Vous avez raison, ils ne remporteront pas la victoire aujourd'hui. Ni demain. Mais année après année, leurs pressions continuelles ont fini par instiller le doute parmi les membres des Ordos : qu'une Inquisitrice aussi jeune puisse prononcer les mots "Excommunicate Traitoris" à votre encontre sans être immédiatement réduite au silence par une opposition véhémente révèle que les certitudes du Concile ont été ébranlées. Si elle n'obtient pas votre condamnation, Fennakad demandera tout du moins la mise en place d'une commission d'enquête, qu'elle obtiendra. Le Concile sera prolongé, de nouveaux votes auront lieu. Et tôt ou tard, la majorité basculera.

Au fond de la salle, les premiers Inquisiteurs revenaient des jardins. Les débats n'allaient pas tarder à reprendre. Mantis jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule avant de continuer.

- Il suffirait pourtant qu'un noyau d'opposition se constitue pour que les Inquisiteurs indécis se rallient à votre cause ; la plupart de mes confrères pensent en leur for intérieur que les Dark Angels sont indispensables à la sauvegarde de l'Imperium. Seulement, aucun ne souhaite courir le risque d'être le premier à prendre fait et cause pour vous. Ils craignent trop d'être accusés de collusion dans l'éventualité où des preuves indiscutables viendraient à être présentées contre les Dark Angels.

- Et vous proposez d'organiser vous-même ce noyau d'opposition ?

Le regard du vieil homme quitta Pertinax pour se perdre dans le vague.

- Oui. L'avis de mes confrères n'a plus d'importance à mes yeux, c'est un risque que je suis prêt à prendre. En contrepartie, j'aurai moi aussi besoin de votre aide, dans un autre domaine.

C'était donc ça ! Un marché. Ce vieux renard n'avait proposé ses services à Pertinax que parce qu'il espérait en tirer un quelconque avantage. La sauvegarde des Dark Angels lui était sans doute indifférente. A moins que ce ne fût un piège, un autre stratagème échafaudé par l'Inquisition pour éprouver le Grand Maître et le convaincre de complot.

- C'est hors de question, répondit finalement Pertinax d'une voix glaciale. L'honneur des Dark Angels ne s'achète pas.

Mantis haussa les épaules, seul un léger rictus venant trahir sa contrariété. Sans un mot, il fit volte-face. Mais au lieu de gagner sa place originelle, il s'assit tout près du Grand Maître, un rang en arrière. Pendant ce temps, l'amphithéâtre s'était à nouveau empli de murmures et de messes basses.

- Mes très chers frères, mes très chères soeurs, nous allons procéder au vote.

Le maître de cérémonie venait de reparaître sur l'estrade. Il paraissait plus tendu que jamais, et de toute évidence, il était complètement dépassé par les évènements.

- Qui se prononce en faveur de la motion proposée par l'Inquisiteur Fennakad ?

Un silence de mort s'abattit sur la salle. Plusieurs mains se levèrent à l'unisson.

- Douze voix. Qui se prononce contre ?

D'un bout à l'autre de l'amphithéâtre, les Inquisiteurs s'observaient discrètement, jetant des coups d'oeil furtifs de droite et de gauche. Timidement, quelques mains se levèrent, l'une après l'autre, jusqu'à ce que douze voix fussent réunies. Alors, avec une moue boudeuse et une gêne presque palpable, un treizième Inquisiteur se dévoua pour clore le suffrage.

- Treize voix, annonça le maître de cérémonie avec un ton soudain redevenu neutre. La motion est donc rejetée.

- Un instant, protesta une voix féminine.

- Inquisiteur Fennakad ?

- Ce vote ne me semble pas représentatif. Seuls vingt-cinq membres se sont exprimés.

- L'usage veut que la majorité l'emporte. Le Concile s'est donc prononcé de plein droit.

- A mon sens, le Concile n'a prononcé que son indécision. Par son refus de voter, la majorité de ses membres a clairement exprimé ses doutes quant à la loyauté des Dark Angels. Il convient de créer une commission d'enquête plénipotentiaire afin de mener une investigation plus poussée sur ce Chapitre et ses agissements secrets. C'est à ce prix, et à ce prix seulement, que le Concile pourra exprimer une opinion éclairée.

Le maître de cérémonie se mordit la lèvre. Il répondit de façon purement mécanique.

- Je prends acte de votre demande, Inquisiteur Fennakad. Vous nous exposerez demain une liste de candidats susceptibles de faire partie de cette commission. Nous procèderons alors à un nouveau vote.

Satisfaite, la jeune femme se rassit. Un sourire triomphal illuminait son visage.

- Et maintenant, mes très chers frères, mes très chères soeurs, je vous propose de passer au sujet suivant...

Tandis que reprenaient des débats oecuméniques stériles, Pertinax se retourna lentement. Mantis le dévisageait en silence.

- C'est d'accord, lâcha finalement le Grand Maître.

- J'en suis heureux. Nous nous verrons ce soir, aux alentours de minuit. Dans la plus haute tour de Sainte-Capilène.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeDim 2 Sep 2007 - 0:21

L'Inquisitrice Fennakad poussa un soupir de contentement. Levant sa coupe à hauteur des yeux, elle l'agita distraitement à la pâle lueur des éclairages muraux. Le liquide couleur de sang dansait entre les parois de cristal avec un léger clapotis, rendu presque inaudible par le bourdonnement insistant de la climatisation.

- Excellent vin, directement importé de Lumen Angelis. Un verre, peut-être ?

Le colosse ne répondit pas. Dans la pénombre dépouillée du bunker, son imposante silhouette immobile évoquait une statue. Mal à l'aise, les Inquisiteurs présents se turent.

- Non, vraiment ? Vous avez tort, chapelain. Rien de tel qu'un Lumen Angelis pour fêter une victoire.

Fennakad vida sa coupe d'une seule traite et gratifia l'Astartes d'un large sourire.

- Une victoire dans laquelle vous avez joué un beau rôle, reprit-elle. Votre prestation était remarquable, vous savez. Hum... à la réflexion, vous en avez peut-être un peu trop fait. Cette tirade sur la lâcheté de l'Inquisition, sur votre désir de prendre le Roc d'assaut... quelque peu excessif, vous ne trouvez pas ?

Le géant s'avança d'un pas lourd, qui se répercuta longuement en écho sur les parois de béton.

- Je ne suis pas votre pion, Fennakad. J'ai dit ce que j'avais à dire, en mon nom et en celui des Black Templars. Votre opinion ne m'intéresse pas.

La jeune femme haussa les épaules.

- Aucune importance. Votre petite provocation était certes imprévue, mais elle a eu un impact tout à fait positif, en incitant le Concile à ruminer sur son habituel manque d'initiative. Encore une journée d'efforts, et les Dark Angels seront voués aux flammes.

- Faites votre oeuvre, alors. Pour ma part, je m'en retourne sur le Purifictis.

Fennakad s'empara de la bouteille poussiéreuse et se versa un autre verre.


- Certainement pas, Thargannis. Nous avons encore besoin de vous pour cette dernière joute.

- J'ai apporté mon témoignage. Je ne peux rien faire de plus. Pendant que je perds mon temps avec vous, mes frères attendent mon retour pour mener une Croisade au nom de l'Empereur.

- Demian III, hein ? Allons, chapelain, cette petite planète sans intérêt pourra bien vous attendre un jour de plus. Il serait dommage d'échouer si près du but et de laisser les Dark Angels échapper à leur destin.

- En quoi ma présence pourrait-elle vous apporter quoi que ce soit, désormais ? Les intrigues et la politique sont votre apanage.

- On ne sait jamais quel atout ce Pertinax pourrait bien sortir de sa manche. Techniquement, tant que la commission d'enquête n'a pas été nommée, le Concile peut toujours faire marche arrière. Votre participation nous permettra de contrer un argument de dernière minute. Et puis... ce sera pour vous l'occasion de réparer un oubli.

- Je suis las de vos devinettes. De quoi parlez-vous ?

L'Inquisitrice avala une gorgée et sourit à nouveau.

- Mais de votre mésaventure sur Cadia, voyons. Lorsque vous attendiez des Dark Angels qui ne sont jamais arrivés... combien de morts, déjà ?

- Comment... ?

La question du chapelain resta en suspens. Il n'avait jamais évoqué ce sujet avec Fennakad et ses sbires.

- Allons, Thargannis, que croyiez-vous ? Nous sommes l'Inquisition. Nous avons les moyens de découvrir ce que nos amis viendraient à nous cacher.

Le Black Templar balaya l'assistance du regard. Comment ces misérables avaient-ils obtenu cette information ? Ses yeux s'arrêtèrent sur un vieil Inquisiteur chauve au regard de fouine, et soudain, il comprit. Sans qu'il sût pourquoi, ce vieillard l'avait toujours indisposé.

- Un psyker ! cracha le chapelain.

- Eh oui. Dommage que Philistin ne soit point parvenu à lire dans l'esprit du Dark Angel ; cela nous aurait grandement facilité la tâche. Hélas, cet Astartes est d'une prudence maladive. Quoi qu'il en soit, je compte sur vous pour évoquer demain ce déplorable incident cadien. Ne nous faites pas faux bond, cette fois.

Thargannis s'avança d'un bond. En un éclair, de longues griffes avaient jailli de ses poignets.

- Prends garde, fillette. Je n'aime pas tes manières !

Des étincelles bleutées couraient le long des lames avec un bruit inquiétant. Imperceptiblement, tous les Inquisiteurs tendirent la main vers leur arme d'ordonnance. Tous, sauf Fannakad, qui se contenta de lâcher un petit rire.

- Ne soyez pas stupide, chapelain. Vous n'allez pas réduire à néant tous vos efforts sur un mouvement d'humeur ? Vous rêviez de voir tomber les Dark Angels, d'obtenir réparation pour l'Ophidium Gulf. Vous avez traversé la moitié de la Galaxie pour nous apporter votre témoignage. Non, Thargannis, vous n'êtes pas assez bête pour renoncer maintenant que la victoire est à portée de main. Et puis... il serait dommage que le Concile se penche d'un peu trop près sur vos propres déviances, ne croyez-vous pas ? Les larges effectifs de votre Chapitre en inquiètent plus d'un.

Le Black Templar hésita un instant. Puis, lentement, il se redressa. Les griffes glissèrent dans leurs logements.

- Je serai là demain. Mais tôt ou tard, Fennakad, vos manigances vous perdront.

Les paroles du chapelain étaient chargées de mépris. La jeune femme s'en amusa.

- J'en doute. Si cela peut vous apporter un peu de réconfort, dites-vous que les ennemis de vos ennemis sont vos amis...

Avec un grognement, Thargannis tourna les talons et disparut dans l'obscurité.



A suivre...

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MessageSujet: Re: Pèlerinage   Pèlerinage Icon_minitimeMar 4 Sep 2007 - 18:28

Les prêtres récitèrent une nouvelle litanie à la gloire de l'Empereur, laquelle fut aussitôt reprise en choeur par les fidèles. La musique surgit alors, sublime et empreinte de majesté : guidées par l'organiste, des milliers de gorges entonnèrent le chant à l'unisson, témoignant de leur foi en une immense clameur. En dépit de leur épaisseur, les solides murs de pierre en furent ébranlés ; mais la haute voûte de Sainte-Capilène tint bon avec vaillance, comme elle l'avait fait depuis l'aube de l'Imperium.

Pertinax interrompit son ascension pour porter le regard en contrebas. Tout autour de la nef, juchés sur de hautes tribunes d'ébène et d'or, douze évèques et leur cardinal surplombaient une foule innombrable massée à perte de vue. De grands braseros dispensaient une lumière réconfortante, tandis que les encensoirs se balançaient en cadence au bout de longs câbles d'acier. Au loin, dans l'abside, un orgue aux proportions gigantesques dressait de monstrueux tubes d'airain vers les arches de pierre. Cet instrument colossal connaissait-il parfois le repos ? Pertinax en doutait : les hommes de l'Ecclésiarchie se relayaient nuit et jour pour assurer le service perpétuel, pour dispenser un prêche salvateur aux citoyens ivres de foi. Hommes, femmes et enfants s'étaient bousculés, siècle après siècle, pour écouter la sainte parole sous les vitraux de la célèbre cathédrale.

Le Grand Maître reprit la marche. L'escalier s'enroulait en une spirale infinie autour d'une longue colonne garnie de bas-reliefs et flanquée d'un arc-boutant ; de temps à autre, une petite fenêtre ogivale s'ouvrait dans la paroi, révélant d'autres tours, distantes dans la nuit noire. Cependant, au fur et à mesure qu'il montait, Pertinax constatait la raréfaction des traces d'usure sur les marches de pierre : un tel périple devait en décourager plus d'un. Mantis avait-il sciemment choisi un lieu si inaccessible pour leur assurer un semblant de confidentialité ? Pertinax imagina le calvaire du vieil Inquisiteur, condamné à gravir des heures durant cet escalier infernal, et en retira un certain plaisir.

L'ascension devait prendre fin, pourtant. Pertinax déboucha sur un couloir sombre bordé de statues au regard sévère. Faute de mieux, l'officier s'y engagea. Il n'aimait guère l'idée de cette entrevue secrète. Il avait longtemps espéré que sa seule présence au Concile suffirait à régler l'affaire Teufelgarten ; hélas, si la rhétorique et le discours pouvaient emporter l'adhésion d'une assemblée éprise de justice et objective dans ses prises de position, il en allait autrement avec les Ordos. A en croire Mantis, la politique et le compromis arbitraient chaque décision d'importance ; dans ces conditions, les arguments pesaient bien moins que les appuis. Pertinax ne devrait plus se contenter de défendre le Chapitre en public. Il devrait négocier, gagner Mantis à sa cause et convaincre toujours plus d'Inquisiteurs en coulisses. Car en fin de compte, le Concile n'était qu'un spectacle, la partie visible d'une mécanique bien plus vaste et plus complexe. Azrael le savait, sans aucun doute, et son choix s'était naturellement porté sur celui de ses officiers qu'il estimait le plus apte à gagner des soutiens auprès de Terra. A cette pensée, Pertinax sentit se raffermir sa détermination : il ferait échouer les plans de Fennakad, à n'importe quel prix.

La cape déchirée du Grand Maître s'agita soudain. Le couloir était ponctué de larges fenêtres dépourvues de vitraux, dans lesquelles le vent s'engouffrait en puissantes rafales. Pertinax remarqua distraitement que les masses d'air étaient chargées de fines gouttelettes de pluie ; mais son attention était accaparée par la frêle silhouette qui venait de faire son apparition au bout du corridor. Mantis. Le vieil homme était blême, ses épaules agitées de tremblements tandis qu'il luttait pour reprendre son souffle. Sous son heaume, Pertinax s'autorisa un sourire.


- Il est minuit, constata-t-il en s'avançant jusqu'au vieillard.

- Ah, Pertinax, vous voila enfin. N'avez-vous pas été suivi ?

- Pas à ma connaissance.

- Bien.

Mantis toussa bruyamment, puis reprit :

- J'ai d'ores et déjà pris contact avec mes amis politiques au sein de l'Ordo Hereticus. Plusieurs d'entre eux m'ont fait part de leur soutien. Quelques confrères de l'Ordo Xenos m'ont également assuré qu'ils considéraient les Dark Angels comme un outil de choix dans leur lutte contre la racaille extraterrestre.

Tout en parlant, l'Inquisiteur s'était mis à déambuler le long du couloir. Pertinax l'accompagna, marchant à ses côtés tandis que le vieil homme devisait tout haut.

- Reste l'Ordo Malleus. Je n'ai malheureusement qu'une influence limitée auprès de cet ordre. En tout état de cause, il nous faudra de nouveaux arguments pour contrer ceux de Fennakad.

- Vos amis ont-ils vraiment besoin de ces arguments pour vous suivre ?

- Je le crains. Il leur faut un prétexte pour se ranger derrière nous, sans quoi leur sincérité pourrait être mise en doute par les partisans de Teufelgarten. Et je ne parle même pas du gros de l'Inquisition, qui reste dans l'indécision depuis que les propos de Thargannis ont ébranlé leur confiance. Il nous faudra un témoin valable pour contrer ce chapelain... pourquoi ne pas faire comparaître un autre officier de l'Adeptus Astartes ?

- Je peux convoquer un représentant des Guardians of the Covenant.

- Allons, Pertinax, les Inquisiteurs ne sont pas si naïfs : nous savons tous que vos successeurs ne sont qu'un moyen détourné de maintenir les effectifs originels de la Première Légion. Il faudra trouver autre chose, si vous voulez rester crédible. N'y a-t-il donc aucun Chapitre qui puisse témoigner en votre faveur ?

Pertinax réfléchit un instant.

- Pas un Chapitre... mais je pense disposer d'un excellent témoin.

- Parfait. Qu'il soit présent dès la reprise des débats.

- J'y veillerai personnellement.

Pertinax s'arrêta net, aussitôt imité par Mantis qui lui rendit son regard insistant. Lentement, le Grand Maître posa la question qui le taraudait depuis des heures.

- Il est temps que vous me révéliez ce que vous attendez de moi.

L'Inquisiteur hocha la tête avec gravité.

- J'ai besoin d'une terre d'asile. Je veux pouvoir trouver refuge sur le Roc.

Sur le Roc ? De quel crime Mantis s'était-il donc rendu coupable pour souhaiter fuir aussi loin de Terra ? Pertinax avait reçu pour mission de dissiper les soupçons de l'Inquisition et d'éloigner la Tour des Anges de ses préoccupations du moment ; il ne pouvait prendre le risque d'aggraver la situation en accueillant un fugitif sur le Roc.

- Qu'avez-vous à vous reprocher, Mantis ?

- J'ai fait une découverte. Une terrible découverte. Et quand je révèlerai ce que je sais à mes confrères... je deviendrai une cible à abattre. Seul un Chapitre dispose de l'indépendance nécessaire pour me garantir une certaine sécurité.

- Et quelle est au juste cette découverte dont vous parlez ?

- Vous le saurez bien assez tôt. Je ne souhaite pas m'exposer inutilement : j'attendrai le moment opportun pour parler.

- Certainement pas, Mantis. Si je dois vous accorder ma confiance, il faudra que vous m'accordiez la vôtre. Vous allez m'exposer la nature de vos révélations, ici et maintenant. Dans le cas contraire, je me verrai dans l'obligation de refuser votre demande. Et si Fennakad obtient sa commission d'enquête, grand bien lui fasse : les Dark Angels sauront la recevoir.

L'Inquisiteur fléchirait-il devant ce bluff grossier ? Pertinax ne pouvait prendre le risque de perdre son soutien. Mais Mantis en avait trop dit pour faire marche arrière en toute impunité. S'il craignait pour sa vie au point de s'impliquer corps et âme dans la défense des Dark Angels, il devait être aux abois. Le vieux renard avait mis Pertinax au pied du mur ; le Grand Maître pouvait bien lui rendre la monnaie de sa pièce !

Pâle comme la mort, l'Inquisiteur était confronté à un redoutable dilemme. Il jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule, comme pour s'assurer que nul espion ne pouvait l'entendre ; puis, à contrecoeur, il se décida.


- C'était il y a deux mois...



A suivre...

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